Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 26, 1846.djvu/337

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sont à bas prix, la main-d’œuvre n’est pas grand’chose à présent. Nous avons fait quelques économies que nous ne saurions mieux employer. Choisissez l’emplacement, jetez les fondations cet automne, faites préparer les bois ; enfin disposez tout pour que vous puissiez faire votre repas de Noël, en 1785, dans votre nouvelle résidence. Nous viendrons tous alors pendre la crémaillère, et vous pourrez vous marier.

— Serait-il arrivé quelque chose qui puisse vous faire croire que je sois si pressé de me marier, mon père ? À la manière dont vous parlez mariage et constructions nouvelles, comme si ces deux idées se rattachaient ensemble dans votre esprit, on serait tenté de le supposer.

Le général regarda ma mère en souriant, et pendant qu’il me répondait, ma grand’mère arriva doucement derrière nous, et vint se pendre à son autre bras.

— J’avoue, mon garçon, que vous ne seriez pas un Littlepage, si vous pouviez voir tous les jours une jeune personne aussi charmante que celle qui est maintenant auprès de vous, sans tomber amoureux d’elle.

Ma grand-mère et ma mère manifestèrent quelque embarras. Elles trouvaient sans doute que le général voulait aller un peu trop vite en besogne ; c’était, suivant elles, risquer de tout compromettre. Quant à moi, mon parti fut bientôt pris. Je résolus de m’armer d’une entière franchise ; et qui sait si je trouverais une occasion plus favorable de révéler mon secret ?

— Ce n’est pas avec vous, mon père, que je voudrais m’entourer de mystère, et je vous exposerai sans détour l’état de mon cœur. Je suis un vrai Littlepage, croyez-le bien. Si j’ai vu tous les jours une jeune personne charmante, mon cœur est loin d’être resté insensible ; et mon désir de me marier est tel que j’espère bien ne pas attendre que le nouveau manoir de Ravensnest soit élevé.

Les acclamations. de joie qui suivirent cette déclaration me firent mal, puisqu’elles ne pouvaient être causées que par un malentendu. Je m’empressai de faire cesser l’erreur de mes parents.

— Je crains bien, leur dis-je avec une certaine confusion, que vous ne m’ayez pas compris.