Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 26, 1846.djvu/343

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Ursule. À votre mine, petite sœur, je serais tenté de croire que vous soupçonniez encore cette nouvelle ?

— Oui, monsieur mon frère, et je vous dirai même que j’ai vu la jeune personne, et que je ne suis pas surprise de votre choix. Anneke et moi, nous avons passé deux heures avec elle ce matin ; et puisque vous ne pouvez épouser Priscilla, je ne connais personne qui puisse mieux la remplacer. Anneke en raffole ! Cette chère Anneke ! avec son esprit calme et judicieux, il lui avait suffi d’une seule entrevue pour apprécier Ursule. Il est vrai que la nièce du porte-chaîne, encore sous l’impression d’émotions si vives et si poignantes, avait banni en grande partie cette réserve qui lui était naturelle, et ses rares et solides qualités s’étaient révélées à sa nouvelle amie. Elle n’avait pas été lui confier, comme quelque petite sotte pensionnaire n’eût pas manqué de le faire, l’état de son cœur, et lui révéler notre attachement réciproque. Si ma sœur en était instruite, c’était par Priscilla Bayard, à qui Frank n’avait rien eu de plus pressé que de tout raconter. Catherine m’avoua plus tard que son amie lui avait exprimé tout son bonheur d’apprendre que la préférence qu’elle avait accordée à Frank avant de me connaître ne me causerait aucun regret, et qu’elle avait l’espoir de m’avoir pour beau-frère.

— Voilà qui me passe, s’écria le général ; qui s’y serait jamais attendu ?

— Nous n’avons pas à nous occuper du choix de miss Bayard, dit ma mère avec sa rectitude d’esprit ordinaire. Elle est sa maîtresse, et si ses parents approuvent son choix, nous n’avons pas une seule observation à faire. Quant à la personne dont parle Mordaunt, il trouvera sans doute tout naturel que nous prenions le temps de nous former une opinion à son égard.

— C’est tout ce que je demande, ma bonne mère. Attendez, pour vous prononcer, que vous ayez vu Ursule, que vous la connaissiez à fond. Vous jugerez alors si elle mérite de devenir votre fille. Je me soumets d’avance à votre décision.

— Très-bien, mon fils ; votre mère et moi, nous n’en demandons pas davantage, dit le général.

— Après tout, Anneke, reprit ma mère, je ne sais trop si nous ne serions pas en droit de nous plaindre de la conduite de