Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 27, 1847.djvu/21

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Surpris et alarmé, je contemplai mon oncle, tandis qu’il cachait sa figure dans ses mains, comme pour dérober à sa vue ce méchant monde et tout ce qu’il contenait. Je ne disais mot, car je voyais que le vieillard était réellement affecté, et j’attendais qu’il lui plût de m’en communiquer davantage. Mon impatience cependant fut bientôt soulagée, lorsque, ses mains s’étant abaissées, je pus voir encore la contenance belle mais obscurcie de mon oncle.

— Puis-je vous demander la nature de ces nouvelles ? me hasardai-je à dire.

— Tu le peux, et je vais te le faire savoir. Il est convenable, au fait, que tu entendes tout, et que tu comprennes tout ; car tu as un intérêt direct dans l’affaire, et une portion considérable de ta propriété répond des résultats. N’avait-on pas parlé avant notre départ des troubles des manoirs, comme on les appelle ?

— Certainement, quoique cela ne fît pas alors grand bruit. Je me souviens que nous en avons vu quelque chose dans les journaux, au moment de partir pour la Russie ; et vous en parliez même comme d’une affaire qui ne faisait pas honneur à l’État quoiqu’elle ne dût pas, disiez-vous, avoir des résultats bien importants.

— Je le pensais alors ; mais cette espérance était trompeuse : c’est malheureusement une des tristes lois de l’humanité de faire le mal surtout dans des matières qui concernent la bourse.

— Je ne comprends pas parfaitement l’allusion, Monsieur.

— Je vais te l’expliquer. Tu connais la propriété des Van Rensselaer elle est, comme tu le sais, d’une grande étendue, mesurant quarante-huit milles de l’est à l’ouest, et vingt-quatre du nord au sud. À l’exception du sol de trois ou quatre villes, dont trois contiennent six, vingt et quarante mille âmes, toute cette surface était la propriété d’un seul individu. Depuis sa mort, elle appartient à deux maîtres, mais elle est soumise aux conditions des baux, dont la plupart sont ce qu’on appelle des baux perpétuels.

— J’ai entendu parler de tout cela, Monsieur ; mais qu’est-ce qu’un bail perpétuel ? car je crois que nous n’en avons pas de cette nature à Ravensnest.

— Non ; tes baux sont sur trois têtes successives, et la plupart avec faculté de renouvellement à l’expiration. Il y a deux sortes de baux