Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 27, 1847.djvu/292

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— Cette foule ! je n’ai vu aucune foule, chacun avait quitté l’église avant moi, et tout s’était passé paisiblement. Ah ! par ma foi, cela ressemble effectivement à une foule réunie là-bas sur la route : on dirait même un meeting organisé. Oui, voilà le président assis sur une barrière, et celui qui tient un papier à la main est sans doute le secrétaire : c’est très-régulier et très-américain, tout cela ! Ils méditent quelque méchant projet, j’en réponds, sous la forme d’une manifestation de l’opinion publique. Voyez, il y a un gaillard qui pérore et gesticule avec beaucoup de vigueur.

Nous nous arrêtâmes tous un instant pour examiner les mouvements de cette foule qui avait tous les caractères d’un meeting public. Ces hommes étaient là, me dirent mes compagnes, depuis le moment où ils avaient quitté l’église, paraissant occupés de sérieuses délibérations. Le spectacle étant curieux et le temps très-beau, nous nous promenâmes tranquillement dans la prairie, nous arrêtant de temps en temps pour voir ce qui se passait derrière nous.

Nous avions de cette manière parcouru environ la moitié de la distance qui nous séparait de la maison, lorsqu’en nous retournant nous vîmes que la foule s’était dispersée, les uns s’en allant dans leurs wagons, les autres à cheval, d’autres à pied. Trois hommes cependant se dirigeaient vers nous en toute hâte, comme s’ils voulaient nous atteindre. Ils avaient déjà traversé la barrière, et suivaient le sentier de la prairie : c’était un chemin que prenaient seulement les personnes qui venaient habituellement à la maison. Dans cet état de choses, je résolus de m’arrêter et de les attendre, et je communiquai ma résolution aux jeunes personnes qui m’accompagnaient.

— Comme ces hommes viennent évidemment à ma rencontre, leur dis-je, veuillez, Mesdemoiselles, poursuivre votre marche vers la maison pendant que je les attends ici.

— Au fait, répondit Patt, ils ne peuvent avoir à te dire que des choses que nous désirons peu entendre, et tu nous rejoindras promptement. N’oublie pas, Hughes, que le dimanche nous dînons à deux heures, le service du soir commençant à quatre.

— Non, non s’écria vivement Mary Warren, nous ne devons pas, nous ne pouvons pas quitter M. Littlepage, ces hommes peuvent lui faire quelque mal.

Je fus enchanté de ce témoignage d’intérêt si naturellement