Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 27, 1847.djvu/345

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lac salé est un pays éloigné, rempli de Faces-Pâles, qui vivent dans de grands villages et au milieu de champs éclaircis. Vers le soleil couchant étaient aussi de grands champs, mais pas de Faces-Pâles et peu de villages. Quelques-uns de nos sages croyaient que ces champs étaient ceux des hommes rouges qui suivaient les Faces-Pâles à la suite du soleil ; d’autres croyaient que c’étaient des champs dans lesquels les Faces-Pâles suivaient les hommes rouges. Je crois que ceci était la vérité. L’homme rouge ne peut se cacher dans aucun coin où la Face-Pâle ne puisse le trouver. Le Grand Esprit le veut ainsi ; c’est sa volonté ; l’homme rouge doit se soumettre.

Mes enfants, le voyage que vous me proposez de faire est trop long pour la vieillesse. J’ai tant vécu avec les Faces-Pâles, que la moitié de mon cœur est blanc, quoique l’autre moitié soit rouge. Une moitié est remplie des traditions de nos pères, l’autre moitié est remplie de la sagesse de l’étranger. Je ne puis couper mon cœur en deux. Il doit aller tout entier avec vous, ou rester tout entier ici. Le corps doit rester avec le cœur, et tous deux doivent rester où ils ont maintenant vécu si longtemps. Je vous remercie, mes enfants, mais ce que vous désirez ne peut arriver.

Vous voyez un homme très-vieux, mais vous voyez un esprit très-incertain. Il y a des traditions rouges et des traditions de Faces-Pâles. Toutes deux parlent du Grand Esprit, mais une seule parle de son fils. Une douce voix a parlé à mon oreille du fils de Dieu. Vous parle-t-on ainsi dans vos prairies ? Je ne sais que penser. Je voudrais penser ce qui est vrai ; mais ce n’est pas aisé à comprendre.

Ici Susquesus se tut et reprit son siège, comme un homme qui était embarrassé d’expliquer ses propres sentiments. Feu-de-la-Prairie attendit quelques instants, mais voyant que l’Onondago restait assis, il se leva pour demander de nouvelles explications.

— Mon père a parlé avec sagesse, dit-il, et ses enfants ont écouté. Ils n’ont pas entendu assez, ils désirent entendre davantage. Si mon père est fatigué de se tenir debout, il peut s’asseoir ; ses enfants ne lui demandent pas de rester debout. Ils aimeraient à savoir d’où venait cette douce voix et ce qu’elle disait. »

Susquesus ne se leva pas, mais il se préparait à répondre. M. Warren se tenait tout près de lui, et Mary s’appuyait sur le bras de son père. L’Onondago fit signe au ministre de