Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 27, 1847.djvu/72

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trouve cela un grand privilège, tel qu’il ne doit pas en exister dans un pays libre. D’autres gens veulent avoir de la terre aussi bien que vos Van Rensselaers et vos Littlepage, et d’autres gens prétendent l’obtenir aussi.

— D’après ce principe, tout homme qui possède de n’importe quelle chose un peu plus que son voisin est privilégié. Même moi, tout pauvre que je suis, j’ai un privilége que vous n’avez pas, monsieur Newcome ; j’ai une soutane et j’ai deux robes, l’une vieille et l’autre neuve, et différentes autres choses de la sorte, dont vous ne possédez pas une seule. Bien plus, je suis privilégié dans un autre sens, car je puis porter ma soutane et mes robes, et je les porte souvent ; tandis que vous ne pourriez les mettre sans vous exposer au ridicule.

— Oh ! mais ce sont là des priviléges dont je me soucie peu ; si je le voulais, je mettrais toutes ces choses, car la loi ne le défend pas.

— Je vous demande pardon, monsieur Newcome, la loi vous défend de mettre contre mon gré ma soutane et mes robes.

— Eh bien, eh bien ; monsieur Warren, ne disputons pas là-dessus ; je n’ai le désir de porter ni votre soutane ni votre robe.

— Je vous comprends alors ; vous ne considérez comme un privilége qui n’est accordé par la loi que ce que vous désirez avoir.

— J’ai peur que nous ne nous accordions jamais, monsieur Warren, sur cette affaire de l’anti-rentisme, et j’en suis fâché, car je serais particulièrement heureux de penser comme vous (en même temps il jetait un coup d’œil expressif vers Mary). Je suis pour le principe du mouvement, tandis que vous appartenez à la doctrine de l’immobilité.

— Certainement je me déclare stationnaire, monsieur Newcome, si le progrès consiste à enlever à d’anciennes familles, depuis longtemps établies dans ce pays, leurs propriétés, pour les donner à ceux dont les noms ne figurent nulle part dans notre histoire, ou plutôt pour les donner à qui que ce soit de préférence à ceux qui y ont droit.

— Nous ne nous entendrons jamais, mon cher monsieur, nous ne nous entendrons jamais.

Se tournant alors vers mon oncle avec cet air de supériorité que les gens vulgaires prennent si facilement ; Sénèque lui dit : — Et vous, ami Dafidson, que dites-vous de tout cela ? êtes-vous pour la rente ou contre la rente ?