Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 29, 1852.djvu/122

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voilà la stricte ration à laquelle il se mit pendant vingt-quatre heures. Dans l’après-midi il voulut se faire la barbe, mais c’était aller trop vite en besogne, il fallut y renoncer.

Le lendemain il eut assez de force pour aller jusqu’à la cuisine et allumer du feu. Il se régala d’une bonne tasse de thé, puis il varia ses repas par de l’arrow-root et du cacao. En même temps il continua ses bains et changea de linge tous les jours. Le cinquième jour il réussit à se raser, ce qui lui fut un grand soulagement, et à la fin de la semaine il parvint à monter sur la dunette d’où il put contempler ses domaines.

Le Sommet se couvrait partout de verdure. Kitty paissait tranquillement sur le penchant du roc ; la douce créature avait appris à franchir l’entrée malgré la voile qui la recouvrait, et elle montait et descendait le sentier frayé, suivant son bon plaisir. Marc osait à peine regarder après les porcs : ils étaient à fouiller et à fourrager partout, et semblaient gras et contents. C’était d’un triste augure pour son jardin, car ils seraient morts de faim pendant sa maladie, s’ils n’y avaient cherché leur vie. Mais il ne pouvait songer encore à aller dans l’île, et il lui fallut se contenter de ce coup d’œil rapide jeté sur sa propriété. La gent volatile paraissait en parfaite disposition, et il crut même voir une petite troupe de poulets qui sautillaient autour de leur mère.

Il fallut encore huit grands jours avant que Marc se décidât à aller jusqu’au Cratère. En y entrant, il reconnut que ses conjectures étaient fondées. Les porcs, avec leurs groins, avaient retourné les deux tiers du potager aussi efficacement qu’il l’aurait pu faire avec sa houe lorsqu’il avait toute sa force. C’était partout un chaos de tiges brisées, de racines enlevées, de fruits à demi rongés : Kitty fut prise en flagrant délit, occupée à brouter des fèves. Les poules ne se faisaient faute ni de pois, ni de maïs ; en un mot tous les animaux avaient vécu dans l’abondance pendant que leur pauvre maître, dénué de tout secours, était entre la vie et la mort.

Marc trouva sa tente toujours en place, et il fut bien aise de