Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 29, 1852.djvu/285

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

celle de Peters avec la femme indienne, furent régularisées par une cérémonie. Le gouverneur jugeait important d’observer toutes les convenances, autant que le comportait la situation.

Trois jours après l’arrivée du Rancocus, au coucher du soleil, l’Abraham mit à la voile pour le Pic, ayant à bord un peu moins de cent colons, y compris les femmes et les enfants. La Neshamony le précédait de quelques heures, portant le gouverneur et sa famille. Marc brûlait du désir de voir sa sœur, et ce désir était peut-être partagé encore plus vivement par ses deux frères.

La rencontre de tous ces membres d’une même famille fut des plus touchantes. Les deux jeunes Woolston trouvèrent leur sœur installée beaucoup mieux qu’ils n’auraient jamais pensé qu’on pût l’être dans une colonie si jeune encore. Heaton s’était élevé une habitation, dans un site ravissant, où il avait sous la main l’eau, des fruits, enfin toutes les commodités de la vie, et il y vivait avec sa famille, entièrement séparé du reste des colons. Cette distinction lui avait été accordée d’un commun consentement, en raison des liens qui l’unissaient au gouverneur, dont il était le mandataire au Pic, et, en outre, à cause de la supériorité que lui donnaient sa naissance et son éducation. Les marins sont habitués à respecter l’autorité ; ensuite ils sont plus accommodants, peut-être, que d’autres, de sorte que les privilèges de Marc et de Heaton, et de leurs familles, n’excitaient point de jalousie dans l’île.

Vers minuit, l’Abraham entra dans l’Anse Mignonne. Vu l’heure avancée, chaque colon, homme ou femme, prit une charge proportionnée à sa force, et gravit la pente. Il faisait un magnifique clair de lune. La plupart des nouveaux venus passèrent la nuit en plein air, sous des tentes ou sous un abri de feuillage qui leur avait été préparé, et bientôt un doux sommeil leur apporta, dans des rêves embaumés, le bonheur et la tranquillité qu’ils venaient chercher sous ce beau climat.

Dès le matin, tous étaient debout, et chacun, en sortant de sa demeure improvisée, ne pouvait croire à la réalité du spectacle