Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 29, 1852.djvu/323

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voilier, et la Marthe eut bientôt jeté l’ancre dans une petite baie, sous le vent de l’île.

C’était la première fois depuis son existence qu’on faisait l’ascension du Cratère. Les cendres et les scories s’étaient accumulées à la base en bien plus grande quantité qu’à la première, visite du gouverneur, et la lave commençait à couler en deux ou trois filets. L’île pouvait avoir alors deux milles de diamètre, et comme elle était à peu près ronde, six milles environ de circonférence. Le Cratère lui-même avait un demi-mille de diamètre, et il s’élevait alors de mille pieds au-dessus de la mer. Au centre de cette vaste vallée, les feux souterrains s’étaient frayé trois issues plus petites. De temps en temps, à un murmure sourd et prolongé succédait un sifflement aigu, semblable au bruit que fait la vapeur comprimée en s’échappant, puis on entendait une détonation accompagnée de fumée, et des pierres étaient lancées à une grande hauteur, puis retombaient dans la vallée. Mais ces explosions devenaient de moins en moins fréquentes.

Le résultat de toutes ces observations fut d’amener la conviction, que ces passages ouverts à la fermentation intérieure de la terre allaient bientôt se fermer, et qu’elle chercherait sans doute à se frayer une autre issue. Brigitte et Marthe n’avaient pas hésité à accompagner leurs maris dans cette ascension ; elles se trouvèrent récompensées de leur peine, et elles déclarèrent l’une et l’autre que les beautés comme les terreurs de ce lieu mémorable resteraient à jamais gravées dans leur mémoire.

En quittant le volcan la Marthe se dirigea vers l’île Rancocus, où elle arrivait au coucher du soleil. Elle jeta l’ancre dans le havre ordinaire et tous les passagers mirent pied à terre. Le fort était toujours gardé, dans l’intérêt du petit nombre d’habitants qui demeuraient dans l’île, quoiqu’une visite des Indiens fût peu à craindre. À l’exception des Kannakas qui étaient employés sur les différents bâtiments, de la colonie, aucun Indien ne s’était montré dans ces parages depuis le jour où le jeune Ooroony avait amené lui-même cinq cents travailleurs. Le nom-