Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 3, 1839.djvu/108

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nant la main, et en la touchant de ses lèvres, nous n’avons aucun motif de nous plaindre de notre sort, relativement à la fortune. Hélas ! bien des gens sont en ce moment plus à plaindre que nous.

— Non, non, s’écria Catherine d’une voix agitée ; Alix Dunscombe s’est trompée ! la Providence n’a pu condamner de braves gens à un destin si cruel.

— Alix Dunscombe est ici pour réparer ses erreurs si elle en a commis, dit une voix douce et tranquille, dans laquelle on pouvait remarquer un léger accent de province, et privée du charme si touchant des moindres mots de miss Howard, charme qui ajoutait une nouvelle mélodie aux expressions vives et enjouées de sa cousine.

La surprise occasionnée par cette interruption soudaine amena un instant de silence. Catherine Plowden, restée sur le tapis dans l’attitude que nous avons déjà décrite, se releva, et elle éprouva un moment de confusion qui vint rendre à ses joues les vermeilles couleurs de la vie. La femme qui venait de parler en entrant avança d’un pas ferme jusqu’au milieu du salon, et après avoir rendu avec une politesse étudiée le salut que lui adressa le colonel, elle s’assit en silence sur le sofa situé en face de celui que sa nièce et lui occupaient.

La manière dont elle était entrée, l’accueil qu’elle reçut et le costume qu’elle portait, prouvaient que sa visite n’était ni extraordinaire, ni désagréable aux deux cousines. Elle était vêtue avec la plus grande simplicité, mais avec une propreté recherchée qui la dispensait de tout autre ornement. Elle ne pouvait avoir plus de trente ans, mais la manière dont elle s’habillait semblait annoncer qu’elle n’était pas fâchée de passer pour être moins jeune. Ses beaux cheveux blonds étaient resserrés sous un bandeau noir, semblable au snood[1] des jeunes Écossaises, qui ne laissait échapper que quelques boucles. Son teint avait beaucoup perdu de son éclat, mais il lui en restait encore assez pour qu’on pût juger de celui dont il avait dû briller quelques années auparavant. Ses grands yeux bleus étaient pleins de douceur, ses dents d’une blancheur éclatante, et ses traits réguliers ; elle portait une robe de soie d’un gris foncé qui allait à ravir à sa taille élégante.

  1. Ruban avec lequel les jeunes filles retiennent leurs cheveux, et que ne portent pas les femmes mariées.