Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 3, 1839.djvu/177

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cacique de Pedie peut fermer les portes de Sainte-Ruth, et en barricadant les fenêtres et armant les domestiques, faire bonne résistance si l’ennemi jugeait à propos d’attaquer notre citadelle. Après qu’il l’aura repoussé, qu’il se repose sur moi du soin de lui couper la retraite.

Cette proposition ne plut pas infiniment à Dillon, car il regardait comme très-probable que Griffith ferait une tentative pour pénétrer dans l’abbaye et enlever sa maîtresse. D’ailleurs, le juriste n’avait pas dans tout son être un seul atome d’esprit militaire. C’était même la crainte qu’il avait eue que cette attaque n’eût lieu dès la nuit précédente qui l’avait déterminé à aller en personne chercher du renfort, au lieu d’en envoyer demander par un exprès. Il se creusait déjà la tête pour trouver quelque moyen de faire changer un arrangement qui lui semblait dangereux à sa sûreté personnelle ; mais le colonel Howard le tira d’embarras, et s’écria, dès que Borroughcliffe eut cessé de parler :

— C’est à moi, capitaine, qu’appartient de droit la défense de Sainte-Ruth, et ce ne sera pas un jeu d’enfant que de me forcer dans mes retranchements. Mais je suis sûr que Kit aimera mieux exercer sa prouesse en rase campagne. Allons, hâtons-nous de déjeuner, après quoi il montera à cheval et servira de guide à la cavalerie le long des côtes, dont il connaît tous les passages difficiles.

— Allons déjeuner ! s’écria le capitaine ; je suis plein de confiance dans le commandant de la forteresse ; et en rase campagne, vive le cacique ! Nous vous suivons, mon digne hôte.

Le déjeuner ne fut pas long ; les militaires prirent à la hâte quelques aliments, et au bout d’un quart d’heure, l’abbaye présenta une scène d’activité comme ses murs n’en avaient jamais vu.

Les troupes à pied et à cheval furent rangées en bon ordre dans la cour. Borroughcliffe laissa en réserve quelques soldats pour garder le château, et partit à la tête des autres au pas redoublé. Dillon se vit avec grand plaisir monté sur le meilleur cheval de chasse du colonel Howard, sur lequel il savait qu’il était à peu près le maître de sa destinée ; son cœur brûlait du désir d’assurer la perte de Griffith, mais il désirait encore plus d’arriver à ce but sans courir aucun danger.

À côté de Dillon était le jeune cornette, monté sur un beau cheval avec toute la grâce d’un excellent cavalier. Après avoir