Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 3, 1839.djvu/240

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— C’est le Tigre, Monsieur ; je connais le coup de bras de ses rameurs aussi bien que celui des miens. M. Merry leur a appris une nouvelle manière de battre l’eau, et je reconnaîtrais le Tigre entre mille barques.

— Donnez-moi la lunette de nuit, s’écria Barnstable avec impatience ; je pourrai voir cette barque si elle reparaît sur cette ligne lumineuse. De par toutes les étoiles de notre pavillon, vous avez raison, Tom ; c’est bien le Tigre ; mais je ne vois qu’un seul homme à l’ancre… Si mes yeux ne me trompent, c’est ce maudit pilote qui s’enfuit lâchement, abandonnant Griffith et Manuel à leur destin. — À terre ! à terre ! Abordez !

L’ordre fut exécuté presque aussitôt, et en moins de deux minutes l’impatient Barnstable, le contre-maître et Dillon étaient tous trois sur le rivage.

L’idée qu’il avait conçue que ses amis avaient été abandonnés par le pilote porta le généreux lieutenant à presser le départ de son prisonnier ; car il craignait que chaque instant ne vînt apporter de nouveaux obstacles à l’exécution de ses projets.

— Monsieur, dit-il à Dillon dès qu’ils furent débarqués, je ne vous demande pas de nouvelles promesses, vous m’avez déjà donné votre parole d’honneur de…

— Si vous croyez que des serments puissent me lier davantage, dit Dillon en l’interrompant, je prêterai tous ceux que vous voudrez me prescrire.

— Je n’exige pas de serments, dit Barnstable ; la parole d’un homme d’honneur doit suffire. Je vais envoyer mon contre-maître avec vous à l’abbaye ; ou vous reviendrez avec lui dans deux heures, ou vous le renverrez avec M. Griffith et le capitaine Manuel. Partez, Monsieur, vous êtes libre conditionnellement. Voici une ouverture par laquelle vous pourrez facilement gravir les rochers.

Dillon fit de grands remerciements à son vainqueur, et se mit en marche.

— Suivez-le, dit Barnstable à son contre-maître à haute voix, et obéissez à toutes ses instructions.

Tom, accoutumé depuis longtemps à une obéissance implicite, prit son harpon, et il suivait déjà les pas de son nouveau conducteur quand il sentit la main du lieutenant sur son épaule.