Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 3, 1839.djvu/306

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empêcha d’être émues aussi vivement qu’on pouvait supposer qu’elles auraient dû l’être en voyant Merry découvert et arrêté.

Ce jeune homme était comme elles l’unique enfant de l’une des trois sœurs qui unissaient par les liens du sang trois des principaux personnages de notre histoire. Sa jeunesse avait inspiré pour lui à ses belles cousines une affection véritablement fraternelle ; mais elles savaient que se trouvant entre les mains du colonel Howard, sa vie était en sûreté quoique sa liberté pût être en danger. Quand donc la première émotion que leur avait causée son arrivée soudaine après une si longue séparation se fut un peu calmée, elles furent moins inquiètes des suites que pouvait avoir pour lui-même son arrestation, que des conséquences qui pouvaient en résulter pour d’autres.

N’ayant plus à craindre les observations d’aucun étranger, elles s’abandonnèrent alors sans contrainte aux mouvements de leur cœur, chacune suivant son caractère. Catherine marchait à grands pas dans l’appartement, avec une sorte d’agitation nerveuse ; miss Howard, la tête baissée et appuyée sur sa main, que couvraient ses tresses de beaux cheveux noirs, semblait vouloir se livrer à ses réflexions avec plus de tranquillité.

— Barnstable ne peut être loin d’ici, dit Catherine après quelques instants de silence. Il est impossible qu’il ait envoyé ici cet enfant sans être à portée pour exécuter quelque projet.

— Quel projet ? dit Cécile en levant sur sa cousine ses yeux bleus pleins de douceur ; il ne peut plus être question d’échange, et peut-être rendra-t-on les prisonniers responsables de la mort de Dillon.

— Croyez-vous que ce misérable soit véritablement mort ? demanda miss Plowden. Ce n’est peut-être qu’une menace, qu’un subterfuge imaginé par Merry, je ne sais dans quelles intentions. C’est un jeune étourdi ; il ne manque pas de hardiesse, et au besoin il agirait comme il parle.

— Il est mort, dit Cécile en tressaillant d’horreur et en s’appuyant de nouveau le visage sur ses mains ; les yeux de Merry, ses traits, son air, toute sa contenance m’ont confirmé ce qu’il disait. Je crains, Catherine, que M. Barnstable n’ait écoute le ressentiment plus que la prudence quand il a appris la trahison de Dillon ; et sûrement, quoique les cruels usages de la guerre puissent justifier une vengeance si terrible contre un ennemi, il