Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 3, 1839.djvu/351

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autour d’elle, comme si elle eût cherché avec inquiétude un autre individu que ceux qui l’environnaient.

— De qui parlez vous ? lui demanda Barnstable ; nous sommes tous ici, et la barque est prête.

— Et m’emmènera-t-il donc ! s’écria-t-elle ; m’emmènera-t-il moi-même ? m’arrachera-t-il à la terre qui m’a vue naître, au pays qui a vu mon enfance, aux lieux qui possèdent toute mon affection.

— Je ne sais de qui vous parlez, madame, dit Barnstable ; si c’est de M. Griffith, le voilà à deux pas derrière ce groupe de marins.

Griffith ayant entendu prononcer son nom, s’approcha des trois dames et leur adressa la parole pour la première fois depuis le départ de l’abbaye.

— Je me flatte qu’on m’a bien compris, dit-il, et que je n’ai, pas besoin de répéter qu’aucune femme ne doit se regarder ici comme prisonnière. Si quelqu’une consent volontairement à se rendre à bord de notre vaisseau, je lui donne la parole d’honneur d’un marin qu’elle y trouvera protection et sûreté ; mais vous êtes toutes parfaitement libres.

— En ce cas, je ne partirai pas, dit miss Dunscombe.

— Et pourquoi partiriez-vous ? dit Cécile ; vous n’avez aucun lien qui vous retienne ici.

Miss Dunscombe jeta un coup d’œil autour d’elle.

— Retournez à Sainte-Ruth, continua Cécile, et soyez-y la maîtresse jusqu’à notre retour, ou jusqu’à ce que le colonel Howard vous fasse connaître son bon plaisir, ajouta-t-elle en jetant un regard timide sur son oncle.

— Je vous obéirai volontiers, ma chère enfant ; mais l’agent du colonel Howard à B. sera sans doute autorisé à se mettre en possession de tout ce qui lui appartient.

Le colonel, tant que sa nièce avait été la seule à parler de consulter son bon plaisir, avait trouvé dans son ressentiment un motif suffisant pour garder le silence ; mais il avait trop de savoir-vivre pour ne pas répondre à une sujette aussi loyale que miss Dunscomhe.

— Je m’expliquerai à ce sujet par égard pour vous, miss Dunscombe, lui dit-il, et non pour aucune autre raison ; car autrement je voudrais que les portes et les fenêtres de Sainte-Ruth restassent ouvertes comme un triste monument des malheurs d’une rébellion,