Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 30, 1854.djvu/31

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Michel en fit de même, et Sarah s’occupait dans la chambre de son oncle. Quant à Dunscomb, il fit quelques arrangements nécessaires pour certains papiers, écrivit deux ou trois notes, et se tint aux ordres de son ami. Cette affaire était précisément de celles que dans sa profession il aimait le plus. Non pas qu’il eût quelque sympathie pour le crime ; il avait une profonde aversion pour tout rapport avec les fripons ; mais il lui semblait, d’après le tableau qu’avait tracé le docteur, que c’était là une mission de miséricorde. Une femme, seule, jeune, sans amis, accusée, ou soupçonnée du plus détestable crime, et cherchant autour d’elle un protecteur et un conseiller, était un objet trop intéressant pour être dédaigné par un homme de cette trempe, après l’appel qui lui avait été fait. Toutefois, il n’était pas dupe de ses sentiments. Tout son calme, sa sagacité, sa connaissance du cœur humain, toutes les ressources de sa profession étaient chez lui en activité, comme elles ne l’avaient jamais été de sa vie. Il comprenait parfaitement deux choses : la première, que nous sommes souvent trompés par les signes extérieurs et l’art des paroles ; que ni la jeunesse, ni la beauté, ni le sexe, ni les grâces personnelles, n’étaient d’infaillibles garants contre les plus noirs forfaits ; la seconde, que souvent l’homme nourrit en lui la défiance et le soupçon, jusqu’à ce qu’ils grossissent au point de ne pouvoir plus être cachés, et cela, grâce à cette propension naturelle de se monter l’imagination et de la repaître de chimères. Contre ces deux faiblesses il résolut en ce moment de s’armer lui-même, et quand toute la bande sortit de la porte, notre conseiller avait la tête aussi nette et aussi impartiale, que s’il eut été un juge.

Pendant ce temps, les jeunes gens avaient acquis une connaissance générale de l’affaire pour laquelle ils se mettaient en route, et le premier sujet qui surgit en quittant le seuil de la maison, fut une question posée par John Wilmeter : c’était la continuation d’une discussion commencée entre lui et son ami : — Myke et moi nous différons légèrement d’opinion sur un point concernant cette matière, et je serais bien aise de vous le voir éclaircir à titre d’arbitre. Supposez que vous ayez des raisons pour croire