Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 30, 1854.djvu/36

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routes sinueuses. Ainsi en était-il pour Dunscomb. Il n’était pas sorti de la ville depuis l’été précédent, et son contentement était vif en jouissant du délicieux parfum des vergers et en repaissant ses yeux de leur beauté. À ces charmes devenus nouveaux pour lui s’unissaient Ceux de la saison, et, pendant que la voiture roulait dans la longue, nous pourrions même dire l’unique rue de Biberry, Dunscomb se trouvait dans un état d’esprit calme et plein de satisfaction. Il venait pour assister une femme sans appui ; il venait spontanément et sans songer au sacrifice de temps ou d’argent ; en réfléchissant cependant à certaines circonstances, il se prenait à douter quelque peu de l’entière sagesse de sa démarche. Toutefois il persistait, heureux de pouvoir empêcher un acte d’injustice et d’oppression.

Biberry se trouvait dans un état d’émotion générale. Il y avait là rassemblés au moins une douzaine de médecins appartenant tous au comté, et cinq ou six journalistes accourus de la ville. Il circulait des rumeurs de toutes sortes, et le nom de Marie Monson était dans toutes les bouches. Elle n’était cependant pas encore en état d’arrestation, mais on la surveillait avec soin et deux grandes malles qui lui appartenaient, ainsi qu’une boîte d’une certaine dimension, couverte en toile cirée, quoiqu’elles ne fussent pas absolument saisies, — étaient placées de manière à ce qu’elle ne pût en rien distraire. Toutes ces circonstances, ne semblaient pourtant causer à la jeune fille aucune espèce d’inquiétude : elle se contentait de ce que contenait son sac de nuit, disant que cela lui suffisait. C’était parmi les fortes têtes de l’endroit un problème de savoir si elle savait ou non qu’elle était soupçonnée.

Si Dunscomb avait cédé aux sollicitations de Mac-Brain, il se serait immédiatement transporté à la maison ou s’était retirée Marie Monson ; mais il préféra suivre une autre marche. Il jugea prudent de prendre le rôle d’observateur, jusqu’au moment où s’ouvrirait l’enquête. Circonspect par habitude, et calme par tempérament, il préférait examiner l’état des choses avant de se commettre. La présence des journalistes le troublait : ce n’est pas qu’il redoutât la basse tyrannie que cette classe d’hommes a coutume d’exercer ; car aucun membre du barreau n’avait plus de