Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 4, 1839.djvu/112

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Mrs Lechmere fut quelque temps sans répondre, et Lionel en profita pour faire un violent effort sur lui-même, et s’arracher à une conversation qui l’intéressait vivement, mais qui n’était point faite pour son oreille. Il arriva dans le parloir, et se jeta sur un siège sans s’apercevoir qu’il n’était pas seul.

— Quoi ! le major Lincoln est déjà rentré ! s’écria la douce voix de Cécile Dynevor qui était assise de l’autre côté de la chambre ; et le voilà armé jusqu’aux dents comme un bandit.

Lionel tressaillit, et répondit en se frottant le front, comme un homme à demi éveillé :

— Oui, un bandit, ou tout autre nom qu’il vous plaira de me donner ; je les mérite tous.

— Certainement, dit Cécile en pâlissant, personne n’oserait parler ainsi du major Lincoln, et lui-même ne se rend pas justice.

— Quelle extravagance ai-je donc prononcée, miss Dynevor ? s’écria Lionel en revenant à lui ; j’étais tellement absorbé dans mes pensées, que j’ai entendu votre voix sans comprendre votre question.

— Cependant vous êtes armé ; je vois votre épée, et vous portez même des pistolets !

— Oui, répondit le jeune militaire en déposant ces armes dangereuses, j’accompagne cette nuit, comme volontaire, un détachement qui doit s’avancer dans l’intérieur des terres, et j’ai voulu me donner un air tout guerrier, quoique vous connaissiez bien mes intentions pacifiques.

— S’avancer dans le pays et dans l’ombre de la nuit ! dit Cécile en pâlissant encore davantage et en respirant à peine. Et comment le major Lincoln s’associe-t-il volontairement à une pareille entreprise ?

— Je ne compte faire autre chose que d’être témoin de ce qui peut arriver, et j’ignore autant que vous le but de l’expédition dont il s’agit.

— Alors restez où vous êtes, dit Cécile d’un ton ferme, et ne prenez point part à une entreprise qui peut être impie dans son but et dangereuse dans ses résultats.

— Quant au but, je n’ai rien à me reprocher, puisque je l’ignore, ma présence ou mon absence n’y saurait rien changer ; et il ne peut y avoir de danger à accompagner les grenadiers de l’infanterie légère de cette armée, miss Dynevor, lors même