Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 4, 1839.djvu/229

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jour, dit Lionel d’un air pensif. Je croyais effectivement me souvenir d’avoir vu plusieurs fois une femme près de mon lit, mais il me semblait qu’elle était plus jeune et plus active que ma tante.

— Et vous ne vous trompez pas, Monsieur ; vous avez eu pendant ce temps une garde telle qu’on en rencontre rarement. Je garantis qu’on chercherait en vain dans l’hôpital de Guy à Londres une vieille femme aussi habile qu’elle pour faire un chaudeau ou un posset[1], et à mon avis le meilleur cabaretier de toute l’Angleterre n’est qu’un âne auprès d’elle pour préparer le negus[2].

— Ce sont de grands talents ; et qui est celle qui les possède à un si haut degré ?

— Miss Agnès, Monsieur. C’est une garde comme en trouverait difficilement, que miss Agnès Danforth ! quoique je ne puisse dire qu’elle se distingue beaucoup par son affection pour les troupes royales.

— Miss Danforth ! répéta Lionel en baissant les yeux avec un air de désappointement ; j’espère qu’elle n’a pas été seule à se donner tant d’embarras pour moi. Il ne manque pas de femmes dans cette maison. Il semble que de tels soins auraient pu se confier à quelque domestique. Quoi ! Meriton, n’avait-elle personne pour l’aider dans les services qu’elle me rendait ?

— Pardonnez-moi, Monsieur ; vous devez bien croire que je l’aidais autant que je le pouvais ; mais le négus que je faisais n’était pas comparable à celui de miss Agnès.

— On croirait, à vous entendre, que je n’ai fait qu’avaler du vin depuis six mois, dit Lionel avec un peu d’impatience.

— Mon Dieu, Monsieur, vous ne vouliez quelquefois pas boire plein un dé d’un verre qu’on vous présentait, ce que je regardais comme un symptôme fâcheux ; car, comme je le finissais toujours, j’étais sûr que ce n’était pas la faute de la liqueur si vous ne la buviez pas.

— En voilà bien assez, Meriton ; ne me parlez plus de votre breuvage favori ; ce sujet m’ennuie. Mais, dites-moi, nul autre de mes amis n’est-il venu demander de mes nouvelles ?

— Oh ! pardonnez-moi, Monsieur. Le commandant en chef a envoyé tous les jours un de ses aides de camp, et lord Percy est venu lui-même plus de…

  1. Mélange de sucre et de vin, aromatisé avec de la muscade.
  2. Espèce de limonade de vin.