Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 4, 1839.djvu/421

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Mais l’expérience qu’ils avaient acquise dans la journée de Breeds était pour les Anglais une leçon qu’ils n’avaient pas encore oubliée. Les mêmes chefs devaient être les principaux acteurs du nouveau drame qui devait se jouer, et ils allaient employer ce qui restait de ces régiments qui avaient perdu tant de monde lors de cette première action. Les paysans à demi disciplinés des colonies n’étaient plus regardés avec mépris, et leurs opérations, conduites avec hardiesse pendant tout l’hiver, avaient appris aux généraux anglais qu’à mesure que la subordination faisait des progrès parmi leurs ennemis, la direction de tous leurs mouvements montrait plus de sagesse et de vigueur. La journée se passa en préparatifs, et des milliers d’hommes dormirent tout armés la nuit suivante dans les deux armées, dans l’attente de se lever le lendemain matin pour être conduits sur un champ de carnage.

D’après la lenteur des mouvements de l’armée royale, il est assez probable que la plupart des forces qui la composaient ne regrettèrent pas l’intervention de la Providence, qui leur épargna certainement l’effusion de torrents de sang, et assez vraisemblablement l’ignominie d’une défaite. Une de ces tempêtes soudaines, particulières à notre climat, s’éleva vers la fin de la nuit, forçant les hommes et les animaux à chercher une protection pour leur faiblesse contre les éléments plus puissants qui leur faisaient la guerre. Le moment où il aurait peut-être encore été possible de disputer aux Américains leur position, fut ainsi perdu, et, après avoir enduré tant de privations et avoir perdu un si grand nombre d’hommes depuis tant de mois, Howe commença, en frémissant de rage, ses dispositions pour abandonner une ville contre laquelle le ministère anglais avait agi depuis plusieurs années avec une rigueur occasionnée par la soif aveugle d’une vengeance dont on vit alors l’impuissance.

On ne pouvait exécuter en une heure cette résolution soudaine, devenue nécessaire ; mais comme les Américains désiraient rentrer dans leur ville sans la détruire, ils ne voulurent pas profiter de tout l’avantage que leur assurait la position où ils venaient de s’établir, et qui commandait également l’ancrage, la cité, et la partie la plus vulnérable des défenses de l’armée royale. Tandis qu’on maintenait une apparence d’hostilités par une canonnade irrégulière qui semblait n’avoir d’autre but que de prouver qu’on