Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 4, 1839.djvu/89

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de nombreuses réunions. Une centaine d’hommes y étaient assemblés, et ils devaient être occupés de quelque affaire d’un intérêt majeur, à en juger du moins à la gravité de leur maintien et à l’expression sévère de toutes les figures.

Comme c’était un dimanche, la première idée de Lionel, en entrant dans la salle, fut que son vieil ami, qui semblait prendre fort à cœur les matières religieuses, l’avait amené pour lui faire entendre quelque prédicateur célèbre de sa secte particulière, et pour lui reprocher en même temps, d’une manière tacite, le peu de soin qu’il mettait à observer ce saint jour, reproche que la conscience du jeune homme lui faisait en effet, en se trouvant tout à coup confondu au milieu d’une pareille foule. Lorsqu’il fut parvenu à se frayer un passage à travers un groupe d’hommes qui se tenaient debout à l’entrée de la salle, et qu’il put observer en silence ce qui se passait, il eut bientôt reconnu son erreur.

Le mauvais temps avait engagé tous ceux qu’il voyait réunis à se couvrir des vêtements les plus propres à les garantir de la pluie, et leur extérieur avait quelque chose de sombre, et même jusqu’à un certain point de repoussant ; cependant il régnait dans toute la réunion un air de calme et de décence qui prouvait que c’étaient des hommes qui savaient du moins se respecter.

Quelques minutes suffirent pour apprendre à Lionel qu’il se trouvait au milieu d’une assemblée réunie pour discuter des questions qui se rattachaient à la position politique de la ville, quoiqu’il fût assez embarrassé pour découvrir les résultats positifs qu’elle devait avoir. Lorsqu’une question était posée, il se levait un ou deux hommes qui disaient leur avis dans un langage familier, et avec un vice de prononciation si grand, et l’accent si marqué de la province, qu’il était impossible de croire que ces orateurs fussent autre chose que des artisans et des marchands de la ville. Tous, ou du moins le plus grand nombre, avaient un air froid et réfléchi, qui aurait pu faire suspecter un peu la sincérité de leur zèle pour la cause qu’ils semblaient avoir épousée, sans les invectives amères et violentes qu’ils vomissaient de temps en temps contre les ministres de la couronne, et sans l’unanimité parfaite qu’ils manifestaient lorsque chacun donnait son avis selon l’usage des assemblées délibérantes.

On lut plusieurs propositions dans lesquelles les remontrances les plus respectueuses se trouvaient mêlées singulièrement aux