Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 6, 1839.djvu/167

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l’obligation, beaucoup d’obligation, ajouta-t-il en s’essuyant les yeux, sans y penser, avec le pan de son habit ; mais il sait que j’en ferais autant pour lui, si je le pouvais, et il le verra, si jamais j’en trouve l’occasion en remplissant les devoirs de la place. Oui, je les remplirai, cousine Bess, et je les remplirai bien. Ce chien de vent du sud ! comme il fait venir l’eau aux yeux !

— Maintenant, cousin Richard, dit Élisabeth en riant, j’espère que je ne vous entendrai plus vous plaindre, comme autrefois, de n’avoir rien à faire dans un pays où, suivant moi, tout est à faire.

— Oui, tout est à faire, dit M. Jones en se redressant de manière à donner à sa petite taille la plus haute élévation possible ; mais tout sera fait, et bien fait. Il ne s’agit que d’agir systématiquement, et c’est à quoi je réfléchirai dès ce matin. Il me faut des substituts, comme vous le sentez ; je diviserai le comté en districts, et j’en aurai un dans chacun. J’en placerai même un à Templeton ; ce sera mon département de l’intérieur. Voyons, qui choisirai-je ? Benjamin ? Oui, Benjamin. Il est naturalisé, et il conviendrait admirablement à cette place ; c’est dommage qu’il ne sache pas monter à cheval.

— Mais il est expert en fait de cordages, monsieur le shérif[1] ; et par conséquent il pourrait se rendre très-utile pour l’exécution des jugements de la cour criminelle.

— Eh ! non, non, cousine ; s’il s’agissait de pendre un homme, je me flatte que personne ne serait en état de le faire mieux que… C’est-à-dire… ah ! oui, oui, Benjamin, en pareil cas, pourrait être d’une grande utilité ; mais je crois que j’aurais autant de peine à lui apprendre à accrocher convenablement une corde à une potence, qu’à le déterminer à monter à cheval. Non, non, il faut que je cherche un autre substitut.

— Eh bien ! Richard, comme vous avez tout le temps de vous occuper de cette importante affaire, je vous prie de donner quelques moments à la galanterie. Où sont les améliorations que vous avez à me montrer ?

— Où elles sont ? Partout. Tenez, ici je dois ouvrir cinq nouvelles rues ; et quand elles seront tracées, que les arbres seront

  1. Les shérifs sont chargés de faire mettre à exécution les jugements des cours criminelles, et si le Jour du Jugement il n’y avait pas d’exécuteur des hautes œuvres, ils seraient obligés d’en remplir eux-mêmes les fonctions.