Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 6, 1839.djvu/236

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de Richard et de jeter le filet, toutes les fois que le shérif ne jugeait pas à propos de présider lui-même à la pêche, et en cette occasion le soin des rames avait été confié à Billy Kirby, et à un jeune homme d’une vigueur reconnue, quoique non comparable à celle du bûcheron. Les autres pêcheurs devaient se tenir près des cordes pour tirer le filet sur le rivage. Les arrangements du départ furent bientôt faits, et Richard, comme l’aurait dit Benjamin, donna le signal pour pousser au large.

Élisabeth suivit des yeux pendant quelques instants la marche de la barque, qui s’éloignait du rivage, en laissant filer une des cordes du filet ; mais bientôt elle disparut dans les ténèbres, et l’oreille seule pût juger de ses opérations. Pendant toutes ces manœuvres, on affecta le plus grand silence, afin de ne pas effrayer les poissons, qui, disait Richard, n’approcheraient pas vers la lumière s’ils entendaient le moindre bruit.

La voix rauque de Benjamin était la seule qui se fît entendre au milieu des ténèbres, tandis qu’il criait d’un ton d’autorité : — Appuyez sur la rame de bâbord, ferme sur la rame de tribord ; allez d’ensemble ! — et qu’il donnait tous les ordres qu’il jugeait nécessaires pour jeter convenablement son filet. Ces dispositions préliminaires prirent quelque temps ; car Benjamin, qui se piquait d’être habile pêcheur, ne voulait pas risquer sa réputation, et il savait que le succès de la pêche dépend, en grande partie, de la manière dont le filet est jeté.

Le bruit que fit le filet, en tombant dans l’eau, annonça la fin de l’opération, et à l’instant même Richard, saisissant un tison embrasé, courut se placer sur la gauche du foyer à une distance égale de celle du point d’où la barque était partie sur la droite, de sorte que le feu en formait le centre. On entendit alors Benjamin s’écrier : — Droit sur M. Jones ! force de rames, et nous verrons quels goujons il y a dans cet étang.

On entendit alors le bruit des rames, et celui de la seconde corde qu’on lâchait en avançant ; bientôt la barque reparut dans le cercle de lumière, et un moment après elle aborda au rivage. Plusieurs mains s’étendirent pour recevoir la corde attachée au filet de ce côté ; et d’autres pêcheurs saisissant également celle qui était restée au point du départ, on commença à tirer de part et d’autre, Richard se tenant au centre, et donnant ses ordres à droite et à gauche, suivant que l’occasion l’exigeait, pour régu-