Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 6, 1839.djvu/388

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commandant lui-même, qui reprocha plus d’une fois à son époux d’avoir condescendu à conduire cette troupe irrégulière après avoir honorablement rempli le poste de sergent-major dans le brillant corps de la cavalerie virginienne pendant la dernière guerre.

La seconde voix était celle de M. La Pompe, qui ne cessait de répéter la même chose de cette compagnie de volontaires, et avec ce ton qu’un habitant du pays de nos pères aime à prendre quand il daigne louer les coutumes ou le caractère de leurs enfants émancipés.

— Il est possible que ces volontaires, disait La Pompe, sachent charger et tirer un fusil ; mais quant à la manœuvre du vaisseau, un caporal de l’artillerie de marine de la Boadicée les aurait entourés et faits prisonniers en un demi-sablier[1]. Comme il n’y avait personne pour contredire cette assertion, l’artillerie de marine de la Boadicée en était, doublement estimée. Le troisième incrédule était M. Le Quoi, qui se contentait de dire que le corps de Templeton était le plus beau qu’il eût jamais vu après les mousquetaires du bon Louis XVI.

Cependant mistress Hollister trouvait qu’il y avait quelque chose de réel dans le service de ces volontaires ; aussi fut-elle trop occupée dans son propre service ce jour-là pour faire ses commentaires. Benjamin était absent, et M. Le Quoi trop content pour trouver à redire à rien. C’est ainsi que ce corps de milice esquiva la critique, et ce fut heureux, un jour où il avait plus besoin que jamais de son courage.

Marmaduke était, dit-on, enfermé dans son cabinet avec M. Van der School, et rien n’interrompit le mouvement des troupes. À deux heures précises, le corps mit l’arme sur l’épaule, et, quand chaque mousquet fut fixé à la position convenable, l’ordre fut donné de tourner à gauche et de marcher. C’était mener à l’ennemi du premier coup des troupes novices : aussi doit-on supposer que ce mouvement ne fut pas exécuté avec la précision habituelle. Mais des que la musique eut fait entendre l’air inspirateur de Yankee-doodle[2], et que Richard, accompagné

  1. Le temps que met à tomber la moitié du sable d’une horloge marine, etc.
  2. C’est de cet air que parle l’auteur dans le chapitre XX.
    L’air de Yankee-doodle est un ai allemand que les Anglais avaient adapté à des paroles de moquerie appliquées aux colons américains, qu’ils appelaient et appellent encore les Yankees. Yankee est une corruption du mot Yengeese, qui est lui-même la prononciation indienne du mot English, Anglais. Quand les troupes royales sortirent de Boston, sous lord Percy, pour aller au secours de leurs partisans qui avaient été attaqués après l’incendie des magasins de la Concorde (voyez Lionel Lincoln), ils marchèrent au son de l’air de Yankee-doodle, en dérision de leurs ennemis. Les Anglais furent repoussés par des paysans armés, et ils auraient été détruits sans l’artillerie et le voisinage de Boston. Les Américains adoptèrent l’air de Yankee-doodle en mémoire de leur triomphe, et il est devenu l’air national des États-Unis, comme le Rule Britannia est l’air de la Grande-Bretagne. Plus de trente mille vers ont été composés depuis sur l’air de Yankee-doodle.