Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 7, 1839.djvu/131

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éveillé en lui des idées endormies depuis longtemps, et se rattachant aux événements d’un siècle passé ; je le savais ! fils ou petit-fils, c’est la même chose, — c’est le même sang, — ce sont les mêmes traits. — Dites-moi maintenant, celui qu’on nommait Duncan, et qui ne portait pas le nom d’Uncas, — vit-il encore ?

Le jeune homme secoua tristement la tête, et répondit : — Non ! il est mort plein de jours et d’honneur ; heureux, chéri, et répandant le bonheur sur tout ce qui l’entourait.

— Plein de jours ! répéta le Trappeur en jetant un coup d’œil sur ses mains maigres et desséchées, mais encore nerveuses. Ah ! il vivait dans les habitations, et il n’était sage qu’à leur manière. — Mais vous l’avez vu souvent ? vous l’avez entendu parler d’Uncas, et des bois solitaires de l’Amérique ?

— Bien souvent. Il était d’abord officier au service du roi ; mais quand la guerre éclata entre la couronne d’Angleterre et les colonies, mon aïeul n’oublia pas quelle était sa patrie, et secouant une fidélité qui ne consistait qu’en de vains mots, il fut fidèle à son pays, et combattit pour assurer sa liberté.

— Il y avait de la raison à cela, et, ce qui vaut encore mieux, il y avait de la nature. — Allons, asseyez-vous, jeune homme, asseyez-vous près de moi, et dites-moi de quoi votre grand-père vous parlait, quand il vous entretenait des merveilles de nos déserts.

Le jeune homme sourit de la curiosité du vieillard, et fut surpris de l’intérêt évident qu’il montrait ; mais, ne voyant dans ceux avec qui il se trouvait rien qui annonçât la moindre intention d’employer la violence contre lui, il s’assit sans hésiter.

— Oui, oui, racontez tout cela au Trappeur depuis le commencement jusqu’à la fin, dit Paul en s’asseyant avec beaucoup de sang-froid à côté du jeune militaire ; c’est l’usage de la vieillesse d’aimer ces anciennes relations ; et quant à cela, je puis dire que moi-même je ne suis pas fâché de les écouter.

Middleton sourit encore, et peut-être y avait-il quelque teinte de dérision dans son sourire ; mais, se tournant vers le vieillard avec un air de bonne humeur, il commença ainsi qu’il suit :

— C’est une longue histoire, aussi pénible à entendre qu’à raconter. Il s’y mêle à chaque instant des scènes de sang, et l’on y retrouve toutes les horreurs et les cruautés des guerres des Indiens.

— N’importe, contez-nous tout cela, dit Paul, nous y sommes