Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 7, 1839.djvu/186

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Il était certainement délicieux pour un jeune époux de pouvoir lire ainsi dans le fond de l’âme sans tache de sa compagne, et de voir que son image y régnait au milieu de la ferveur la plus sainte et la plus pure. En suppliant le ciel de lui accorder la grâce de devenir l’humble instrument de sa conversion, elle le conjurait de lui pardonner à elle-même, si la présomption ou l’indifférence pour les conseils de l’Église l’avaient portée à trop compter sur l’influence qu’elle aurait sur lui, et à risquer peut-être le salut de son âme en épousant un hérétique. Elle exprimait ces sentiments avec tant de ferveur et d’une manière si naturelle, il y avait en elle quelque chose de si angélique pendant qu’elle priait ainsi, que Middleton lui aurait pardonné de lui donner même le nom de païen, en faveur de la douceur avec laquelle elle intercédait pour lui.

Inez était à genoux ; il attendit qu’elle se levât pour se montrer à elle, et il lui laissa ignorer qu’il eût entendu ses prières.

— Il est déjà tard, mon Inez, lui dit-il, et don Augustin pourrait vous reprocher de négliger votre santé, si vous restiez à l’air à une pareille heure. Que dois-je donc faire, moi qui suis investi de toute son autorité, et qui ai deux fois sa tendresse ?

— Lui ressembler en tout, répondit-elle en le regardant les larmes aux yeux ; en tout ! répéta-t-elle en appuyant sur ces mots avec une intention marquée. Imitez mon père, Middleton ; je ne puis demander autre chose de vous.

— Ni pour moi, Inez, dit Middleton. Je ne doute pas que je ne fusse tout ce que vous pouvez désirer, si je devenais semblable au digne et respectable don Augustin. Mais vous devez avoir quelque indulgence pour les faiblesses et les habitudes d’un soldat.

— Maintenant allons rejoindre cet excellent père.

— Pas encore, répondit Inez en se dégageant doucement du bras qu’il lui avait passé autour de la taille, tandis qu’il cherchait à l’entraîner. Il me reste un autre devoir à remplir avant que de me soumettre si positivement à vos ordres, tout commandant que vous êtes. J’ai promis à la digne Inesilla, ma nourrice, qui, comme vous l’avez entendu dire, Middleton, a été si longtemps une mère pour moi, d’aller la voir ce soir. C’est la dernière fois, à ce qu’elle pense, qu’elle pourra recevoir la visite de son enfant, et je ne puis tromper son attente. Allez retrouver don Augustin, et dans une petite heure je serai près de vous.

— Dans une heure, souvenez-vous-en, dit Middleton.