Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 7, 1839.djvu/214

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gnons dans les environs. Faisant ensuite le signe ordinaire de paix, en étendant la paume de sa main nue, il s’avança hardiment vers lui.

L’Indien n’avait montré aucune apparence de crainte, et il laissa approcher le Trappeur en conservant une attitude fière, et un air de dignité et d’intrépidité. Peut-être le rusé guerrier savait-il aussi qu’attendu la différence de leurs armes, le rapprochement les mettrait davantage sur le pied d’égalité. Comme la description de cet individu peut donner une idée de l’extérieur de toute la race, il est peut-être à propos d’interrompre notre narration pour esquisser ses principaux traits imparfaitement et à la hâte. Si les yeux d’Alston ou de Leslie[1] voulaient se détourner un instant des modèles de l’antiquité, pour contempler ce peuple humilié et opprimé, des artistes inférieurs n’auraient pas besoin d’entreprendre ce portrait.

L’Indien en question était à tous égards un guerrier de belle taille, et dont les proportions étaient admirables. Lorsqu’il eut secoué les feuilles sèches dont il s’était couvert à la hâte, son air montra la gravité, la dignité de sa profession, et l’on pourrait ajouter toute la terreur qu’elle inspire. Tous ses traits étaient nobles et presque romains, quoique quelques-uns offrissent les traces bien connues de son origine asiatique. La couleur particulière de sa peau, si propre en elle-même à ajouter à l’effet d’une expression martiale, puisait un nouvel air de férocité dans les diverses couleurs qui la couvraient. Mais, comme s’il eût dédaigné les artifices ordinaires de sa nation, il ne portait aucun de ces signes étranges et horribles auxquels les enfants de la forêt, comme les héros plus civilisés de la moustache, sont habitués à avoir recours pour se faire une réputation de courage, se contentant d’avoir sur le visage de larges lignes d’un noir foncé, qui relevaient l’éclat brillant de sa peau cuivrée, et qui semblaient y servir d’ombre. Sa tête était rasée, suivant l’usage, jusqu’au haut du crâne, où s’élevait une longue touffe de cheveux qui semblaient défier ses ennemis d’oser la saisir. Les ornements suspendus en temps de paix aux cartilages de ses oreilles en avaient été détachés. Quoique la saison fût avancée, son corps était presque nu, et n’était couvert en partie que d’un vêtement fort léger, une peau de daim tannée, sur laquelle était grossièrement peinte, mais en

  1. Savants contemporains.