Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 7, 1839.djvu/219

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de connaître parfaitement le caractère de celui-ci, pour laisser échapper la moindre de ses impressions, pour perdre de vue le plus léger de ses mouvements.

Cependant Hélène, que le même esprit d’observation n’animait pas, rendait à Inez, plus faible et moins résolue, tous les soins ordinaires de l’amitié, et laissait apercevoir sur ses traits pleins de franchise les émotions de joie et de regret qui se succédaient alternativement en elle, quand son esprit actif réfléchissait à la démarche hardie qu’elle venait de faire.

Il n’en était pas ainsi de Paul. Se regardant comme ayant obtenu les deux choses qu’il avait le plus à cœur, la possession d’Hélène et un triomphe sur les enfants d’Ismaël, il s’occupait alors de tout disposer pour la halte projetée, avec le même sang-froid que si, après avoir célébré son mariage devant un magistrat des frontières, il eût déjà été en chemin pour conduire tranquillement son épouse satisfaite dans sa demeure. Il avait suivi la famille errante pendant sa longue et pénible marche, se cachant pendant le jour, et cherchant à avoir des entrevues avec Hélène, comme on l’a déjà dit, toutes les fois qu’il en pouvait trouver l’occasion ; et enfin la fortune et son intrépidité avaient concouru à couronner ses efforts du succès, à l’instant où il commençait à en désespérer. Distance, obstacles, dangers, tout maintenant disparaissait à ses yeux. Armé d’une résolution déterminée, il s’imaginait que tout ce qui lui restait à faire s’accomplirait sans difficulté. Tels semblaient être, et tels étaient véritablement ses sentiments, tandis que, son bonnet placé de côté sur sa tête, et sifflant un air joyeux, il préparait au milieu des buissons un banc de feuilles pour Inez, jetant de temps en temps un regard de satisfaction sur la gentille Hélène, qui contribuait pour sa part à cette bsogne.

— Ainsi donc la tribu des Pawnies-Loups a enterré la hache[1] avec ses voisins les Konzas, dit le Trappeur continuant une conversation qu’il n’avait jamais laissé tomber, quoiqu’il l’eût interrompue plusieurs fois pour donner diverses instructions à ses compagnons. Le lecteur se rappellera, une fois pour toutes, que quoique le Trappeur parlât à l’Indien dans sa langue naturelle, il s’exprimait en anglais quand il avait à s’adresser aux individus qui voyageaient avec lui. — Les Loups et les Peaux Rouges-Pâles

  1. Le tomahawk, c’est-à dire la tribu a fait la paix. Voyez les notes du Dernier des Mohicans.