Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 7, 1839.djvu/223

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course, à l’instant où le Trappeur s’attendait à le voir profiter de son avantage pour s’enfuir, il faisait volte-face et revenait sur ses pas, tantôt avec la rapidité de l’antilope, tantôt plus lentement, et avec plus de calme et de dignité dans tous ses mouvements.

Désirant s’assurer de certains faits qui pouvaient influer sur sa marche future, le vieillard résolut de l’inviter à continuer leur conférence. Il lui fit donc un signe indiquant en même temps ses intentions pacifiques et le désir qu’il avait de reprendre leur conversation interrompue. L’œil alerte du jeune Indien remarqua sur-le-champ ce geste, mais ce ne fut qu’après avoir pris le temps de réfléchir sur la prudence de cette mesure, qu’il se montra disposé à se rapprocher d’une troupe qui lui était si supérieure en force, et qui pouvait en un instant le priver de la vie ou de la liberté. Enfin il s’avança de manière à pouvoir converser sans peine, mais son air exprimait à la fois la hauteur et la méfiance.

— Il y a bien loin d’ici au village des Loups, dit-il en étendant le bras dans une direction contraire à la situation du territoire occupé par cette peuplade, comme le Trappeur le savait parfaitement, et la route est fort tortueuse. Que veut me dire le Grand-Couteau ?

— Oui, assez tortueuse, murmura le vieillard en anglais, si tu veux y arriver en partant de ce côté ; mais encore beaucoup moins que l’astuce d’un Indien. — Dites-moi, mon frère, les chefs des Pawuies aiment-ils à voir dans leurs loges des figures étrangères ?

Le jeune guerrier baissa le corps avec grâce, quoique légèrement, sur la selle de son cheval, et répondit avec une dignité grave :

— Quand ma nation a-t-elle oublié d’offrir quelque nourriture à l’étranger ?

— Si je conduis mes filles à la porte des Loups, leurs femmes les prendront-elles par la main ? leurs guerriers fumeront-ils avec mes jeunes gens ?

— Le pays des visages pâles est derrière eux. Pourquoi voyagent-ils si loin vers le soleil couchant ? Se sont-ils égarés, ou ces femmes appartiennent-elles aux guerriers blancs qui remontent, dit-on, la rivière aux eaux troubles ?

— Ni l’un ni l’autre. Ceux qui remontent le Missouri sont les guerriers de mon grand-père, qui les a chargés de cette mission. Mais, quant à nous, nous marchons sur le sentier de la paix. Les blancs et les Peaux Rouges sont voisins et désirent être amis. Les