Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 7, 1839.djvu/318

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Vous ressemblez à un garçon que j’aimais, et je commençais même à me figurer que quelques gouttes de son sang coulaient peut-être dans vos veines. Mais qu’importe ? vous êtes un véritable homme, je le vois à la manière dont vous gardez votre foi, et l’honneur est un don trop rare pour ne pas être jaloux. Mon cœur saigne pour vous, jeune homme, car je vous aime et je voudrais vous en donner la preuve.

Le jeune guerrier écouta ces paroles que le vieillard prononça avec un accent simple, mais énergique, qui en attestait la sincérité, et il baissa la tête sur sa poitrine nue pour témoigner le respect avec lequel il recevait ces témoignages d’intérêt. Relevant alors ses yeux noirs et brillants, il les fixa de nouveau dans le lointain, comme s’il contemplait des objets qui échappaient à la vue des autres hommes. Le Trappeur l’observa en silence, il savait à quel point la fierté d’un Pawnie le soutiendrait dans ces moments qu’il croyait être les derniers pour lui ; loin de le troubler, il attendit le bon plaisir de son jeune ami avec un calme et une patience, qu’il avait puisés dans ses relations fréquentes avec cette race remarquable. À la fin les regards du Pawnie devinrent moins fixes, puis vifs et brillants comme l’éclair ; ils se portèrent successivement du vieillard sur l’espace, et de l’espace sur ces traits profondément sillonnés, comme si l’âme qui dirigeait leurs mouvements commençait à se troubler.

— Mon père, répondit alors le jeune chef d’un ton de confiance et d’amitié, j’ai entendu vos paroles. Elles sont entrées par mes oreilles et sont maintenant en moi. Le Long-Couteau à tête blanche n’a plus de fils ; le Cœur-Dur des Pawnies est jeune ; mais il est déjà le plus vieux de sa famille. Il a trouvé les os de son père sur le terrain de chasse des Osages, et il les a envoyés dans les Prairies des bons esprits. Point de doute que le grand chef, son père, ne les ait vus, et qu’il ne reconnaisse ce qui fait partie de lui-même. Mais le Wahcondah nous appellera bientôt tous les deux ; vous, parce que vous avez vu tout ce qu’il y a à voir dans ce pays, et Cœur-Dur, parce qu’il a besoin d’un guerrier qui est jeune. Il ne reste pas de temps au Pawnie pour rendre au Visage-Pâle les devoirs qu’un fils doit à son père.

— Tout vieux, tout misérable que je suis à présent, auprès de ce que j’étais jadis, je puis vivre pour voir le soleil se coucher encore dans la Prairie. Mon fils croit-il revoir jamais l’obscurité ?

— Les Tetons comptent les chevelures suspendues à la porte