Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 7, 1839.djvu/344

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être capable, on choisit pour cette grave délibération le lieu même ou s’élevait le poteau auquel était attaché l’infortuné sur le sort duquel le conseil allait être appelé plus particulièrement à prononcer. Middleton et Paul furent amenés tout enchaînés et jetés aux pieds du Pawnie. Alors les guerriers commencèrent à prendre leurs places, suivant le degré d’importance et de considération dont ils jouissaient. Chacun d’eux, en s’asseyant dans le vaste cercle, avait l’air aussi composé, le maintien aussi grave, que si son esprit se préparait sérieusement à administrer la justice sans vouloir en séparer le don céleste de l’indulgence. Une place était réservée pour trois ou quatre des principaux chefs, et un petit groupe des plus vieilles femmes, couvertes d’autant de rides que rage, la rigueur des saisons, les privations de toute espèce, et la violence des passions sauvages en avaient pu accumuler sur leurs figures, se fit jour jusqu’au premier rang, avec une audace à laquelle elles étaient poussées par une soif insatiable de sang et de vengeance, et que rien ne pouvait excuser que leur âge et leur fidélité éprouvée à la nation.

Tous les guerriers, à l’exception des chefs dont nous venons de parler, étaient alors à leur place. Ceux-ci avaient différé de paraître, dans le vain espoir de se réunir tous à la même opinion, afin que l’unanimité des chefs assurât celle de leurs partisans respectifs ; car, malgré l’influence supérieure de Mahtoree, il ne pouvait maintenir son autorité qu’en faisant de fréquents appels à l’opinion de ses inférieurs. Lorsque enfin ces personnages importants entrèrent dans le cercle tous ensemble, leurs regards sombres et leur front rembruni annonçaient assez que, malgré le temps qu’ils avaient mis à se concerter, il régnait entre eux du dissentiment.

Les regards de Mahtoree variaient d’expression à chaque minute. Tantôt ils étaient étincelants, comme s’ils s’allumaient au brasier ardent qui dévorait son âme ; tantôt ils étaient froids et réservés, et avaient l’expression grave qui convient à un chef présidant un conseil. Il s’assit à la place qui lui avait été réservée, avec la simplicité étudiée d’un démagogue ; quoique le coup d’œil rapide qu’il jeta aussitôt sur l’assemblée silencieuse trahît le caractère plus prononcé d’un tyran.

Lorsque tout le monde fut rassemblé, un vieux guerrier alluma la grande pipe de son peuple, et il en souffla la fumée vers les quatre parties du ciel. Après cette cérémonie propitiatoire, il la