Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 7, 1839.djvu/361

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pleuvoir sur le captif, qui n’en conservait pas moins un sang-froid imperturbable, un déluge d’injures telles que la vengeance pouvait leur en suggérer, et l’on sait ce dont les femmes des sauvages sont capables dans de pareils moments ; leurs transports effrénés, leur rage implacable ont été trop souvent décrits pour qu’il soit nécessaire d’en parler de nouveau.

L’effet de cette irruption soudaine était inévitable. Le Balafré, n’ayant plus rien à espérer, alla se cacher dans la foule, tandis que le Trappeur, dont la physionomie expressive peignait l’émotion qui l’agitait intérieurement, se rapprochait de son jeune ami, comme on voit souvent ceux qui sont unis à quelque grand coupable par des liens assez forts pour leur faire braver l’opinion des hommes, rester debout auprès d’eux sur le lieu même de l’exécution, et les assister à leurs derniers moments.

L’effervescence se communiqua bientôt aux guerriers subalternes, quoique les chefs différassent encore de donner le signal qui devait livrer la victime à leur merci. Mahtoree attendait qu’il se fît un mouvement pareil parmi ses affidés, afin de pouvoir cacher plus sûrement sa haine envenimée ; mais bientôt, emporté par sa fureur, il fit un geste pour encourager les bourreaux à commencer.

À ce signal, Wencha, qui depuis longtemps avait les yeux fixés sur le chef pour épier son moindre coup d’œil, bondit de joie comme un chien altéré de sang qu’on lâche sur sa proie. Se faisant jour à travers les mégères, qui des injures en venaient déjà aux actes de violence, il réprima leur impatience, et leur dit d’attendre qu’un guerrier eût commencé à tourmenter la victime, qu’alors ils lui verraient verser des larmes comme à une femme.

L’Indien féroce préluda par brandir son tomahawk au-dessus de la tête du captif, et à l’agiter dans tous les sens de manière à faire croire à chaque coup que l’arme allait s’enfoncer dans la chair, tandis qu’il la maniait assez adroitement pour ne jamais toucher la peau. Cette épreuve ordinaire ne fit aucun effet sur le jeune guerrier. La hache éclatante avait beau tracer mille cercles de feu autour de sa figure, ses yeux n’en restaient pas moins fixés sur l’espace, sans paraître remarquer les efforts impuissants de son ennemi.

Voyant que cet essai ne réussissait pas, le Sioux implacable appuya le tranchant de son arme sur la tête nue de sa victime, et se mit à décrire les différentes manières dont un prisonnier pou-