Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 7, 1839.djvu/373

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femme qui perd la tête, pour vous rendre la liberté, ces infâmes mégères s’en seraient aperçues, et où seriez-vous à présent, je vous prie ? Sous le tomahawk et sous le couteau, comme des enfants sans défense et qui jettent les hauts cris. Oui, voilà où vous en seriez, quoique vous soyez des hommes et que vous ayez de la barbe au menton. Demandez à notre ami le chasseur d’abeilles s’il se trouve en état de tenir tête à un Teton, après avoir été garrotté si longtemps, bien moins encore à une douzaine de squaws sans pitié et altérées de sang !

— Le fait est, vieux Trappeur, répondit Paul en étendant ses membres qu’il était parvenu alors à dégager entièrement, et en s’efforçant de rétablir la circulation du sang qui avait été interrompue, — le fait est que ce que vous dites est rigoureusement vrai. Oui, je suis forcé d’en convenir, moi, Paul Hover, un homme qui ne le céderait à personne à la lutte ou à la course, me voilà tout aussi incapable de faire usage de mes pieds et de mes mains que le jour où j’ai paru pour la première fois dans la maison du vieux Paul qui est parti pour le long voyage. Dieu lui pardonne toutes les petites peccadilles qu’il a pu commettre, tandis qu’il était dans le Kentucky ! Dans ce moment j’ai le pied posé sur la terre ferme, ou bien mes yeux n’y voient plus, et cependant peu s’en faudrait que je ne fusse prêt à jurer qu’ils ne touchent pas la terre de six pouces pour le moins. Ainsi donc, mon brave ami, puisque vous avez déjà tant fait pour nous, ayez la bonté de tenir un peu à l’écart ces squaws infernales, sur lesquelles vous nous avez donné des détails si intéressants, jusqu’à ce que je sois parvenu à dégourdir un peu ce bras qui est raide comme un piquet, et que je sois prêt à les recevoir poliment.

Le Trappeur lui fit signe qu’il comprenait parfaitement ce qu’il désirait de lui, et il se dirigea vers le vieux sauvage, qui commençait à manifester l’intention d’accomplir l’ordre qui lui avait été donné, laissant le chasseur d’abeilles recouvrer autant que possible l’usage de ses membres, et rendre à Middleton le même service qu’il venait de recevoir lui-même.

Mahtoree avait bien choisi l’homme qui convenait pour accomplir sa mission sanguinaire. C’était un de ces sauvages sans pitié qu’on trouve en plus ou moins grand nombre dans toutes les peuplades, et qui s’était fait une certaine réputation dans les combats, en montrant une sorte de courage féroce qui ne prenait sa source que dans un amour inné pour le sang. Étranger à ce sen-