Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 8, 1839.djvu/136

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ce dont je vous soupçonne fort en état. — Savez-vous tenir un faux loch ! ?

— Oui, oui, et jurer qu’il est vrai en cas de besoin. Je vous comprends : vous êtes las de tortiller la vérité comme un cordage qu’on roue, et vous désirez me charger de cette besogne.

— C’est à peu près cela. Il faut que vous contredisiez tout ce que vous avez dit relativement à la Royale Caroline ; et comme vous avez assez d’astuce pour prendre le vent sur Mrs de Lacey, il faut que vous en profitiez pour lui présenter les choses sous un jour encore plus effrayant que je ne l’ai fait. Et maintenant, pour que je puisse juger de vos talens, dites-moi s’il est vrai que vous ayez jamais fait voile avec le digne contre-amiral !

— Foi de bon et honnête chrétien, ce n’est qu’hier que j’ai entendu parler du brave homme pour la première fois. Oh ! vous pouvez vous fier à moi sur cela ; ce n’est pas moi qui gâterai une bonne histoire faute de savoir la broder.

— Je le crois sans peine. Maintenant écoutez mon plan.

— Un instant, mon digne camarade. Les murs ont des oreilles, dit-on sur la terre, et nous autres marins nous savons que les pompes en ont à bord d’un navire. Connaissez-vous en ville une certaine taverne à l’enseigne de l’Ancre Dérapée ?

— J’y ai été quelquefois.

— J’espère que vous ne serez pas fâché d’y retourner. Comme vous êtes le meilleur voilier, vous allez serrer le vent et courir une ou deux bordées entre ces maisons, jusqu’à ce que vous ayez cette église sous le vent. Vous n’aurez alors qu’à voguer en droite ligne chez le brave Joé Joram, où vous trouverez un aussi bon ancrage pour un honnête bâtiment de commerce que dans aucune auberge des colonies. Moi, j’y arriverai par le bas de cette colline, et attendu la différence du nombre de nœuds que chacun de nous aura à filer, nous entrerons dans le port à peu de distance l’un de l’autre.

— Et que gagnerons-nous à cette manœuvre ? Ne pouvez-vous rien écouter qui ne soit trempé dans le rum ?

— Vous m’offensez en parlant ainsi. Vous verrez ce que c’est que d’employer un messager sobre pour faire vos commissions, quand le moment en sera arrivé. Mais si l’on nous voyait chemi-