Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 9, 1839.djvu/139

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afin de soutenir leur faiblesse par les prières du capitaine.

L’étranger ne fit aucune objection à cette proposition prudente ; et, sans prendre les précautions qu’ils avaient observées à leur arrivée, les deux compagnons se trouvèrent promptement à l’entrée secrète qu’ils avaient traversée il y avait peu de temps.

— Entrez, dit l’étranger baissant le morceau de bois pour le passage d’Ében Dudley : entrez, au nom du ciel, car il faut en effet nous rassembler pour demander des secours spirituels.

Dudley allait obéir, lorsqu’une ligne sombre accompagnée d’un sifflement sourd fendit l’air entre sa tête et celle de son compagnon ; au même instant une flèche pénétra dans la poutre.

— Les païens ! s’écria l’habitant des frontières recouvrant toute son énergie lorsqu’un danger connu devint apparent, et il envoya en réponse une traînée de feu dans la direction qu’avait suivie la flèche perfide. — Aux palissades, les jeunes gens ! voici les féroces païens !

— Les païens ! répéta l’étranger comme un écho, d’une voix pleine et sonore ; et qui, suivant toute apparence, avait souvent donné le signal au milieu de scènes d’un plus grand danger encore, et levant un pistolet qui fit ployer le genou à une figure noire glissant sur la neige. Les païens ! ajouta-t-il, les féroces païens !

Les assaillants et les assiégés gardèrent un moment le silence, comme pour rendre un instant de tranquillité à cette nuit qui avait tout à coup été troublée par d’aussi terribles exclamations ; puis les cris des deux aventuriers furent bientôt suivis des hurlements de toute une troupe formant un cercle qui entourait presque la montagne. Au même moment tout objet sombre dans les champs prit une forme humaine ; aux cris succéda une grêle de flèches qui exposaient à la mort tous ceux qui seraient restés hors des barricades. Dudley entra, mais le passage de l’étranger eût été coupé par une bande de sauvages qui s’élançaient en hurlant après lui, si une flamme brillante partie de la montagne opposée, qui éclaira un instant leurs visages basanés, n’eût fait reculer les assaillants sur leurs traces. Un instant plus tard la porte fut fermée, et les fugitifs se trouvèrent en sûreté derrière les énormes piles de bois.