Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 9, 1839.djvu/142

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sous ses ordres les devoirs que l’usage et plus encore le danger imminent leur prescrivait.

— Charité, hâte-toi de te rendre à la forteresse, et vois si les baquets et les échelles sont en bon état, afin que si les païens nous forcent de nous y réfugier, nous ne manquions dans cette extrémité ni d’eau ni de moyens de retraite. Foi, cours vite dans les appartements supérieurs pour prendre garde qu’aucune lumière ne puisse diriger leurs flèches meurtrières dans les chambres. La réflexion vient trop tard, lorsque les dards et les balles ont pris leur essor. Et maintenant que le premier assaut est terminé, et que nous espérons déjouer les ruses de nos ennemis par la prudence, Mark, tu peux aller près de ton père. C’eût été tenter la Providence avec trop de témérité, de t’envoyer avec ton inexpérience au milieu du tumulte du premier danger. Viens ici, et reçois les bénédictions et les prières de ta mère. Ensuite tu te placeras parmi les combattants. Je confie ta jeunesse à la protection spéciale de la Providence. Souviens-toi que tu es aujourd’hui d’un âge à faire honneur à ton nom et à ton origine ; mais que cet âge est trop tendre encore pour être téméraire dans tes paroles, et moins encore dans tes actions, pendant une nuit semblable à celle-ci.

Une rougeur fugitive, qui servit seulement à rendre la pâleur qui lui succéda plus frappante encore, se montra sur les joues de la tendre mère. Elle imprima un baiser sur le front de son fils impatient, qui, après avoir reçu cette marque de tendresse, s’élança au milieu des défenseurs de l’habitation.

— Maintenant, dit Ruth en détachant lentement ses regards de la porte par laquelle le jeune garçon avait disparu, et parlant avec une tranquillité affectée, maintenant nous allons travailler à la sûreté de ceux qui ne peuvent rendre service qu’en donnant l’alarme. Lorsque tu seras certaine, Foi, qu’on n’a négligé d’éteindre aucune lumière dans les étages supérieurs, mène les enfants dans la chambre secrète. De là elles peuvent voir ce qui se passe dans les champs, sans aucun danger de servir de but aux flèches des sauvages. Tu te rappelles, Ruth, les fréquentes leçons que je t’ai données à ce sujet. Qu’aucun bruit, qu’aucun cri effrayant de ceux qui sont en dehors, ne t’engage à quitter ton poste ; tu seras là plus en sûreté que dans la citadelle, contre laquelle sans doute bien des flèches seront dirigées ; si nous étions forcés de nous y réfugier, on t’en avertirait promptement