Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 9, 1839.djvu/167

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habileté ; elle s’arrêta sur des matériaux presque aussi inflammables que de la poudre, et l’œil l’avait à peine suivie dans sa course et sa chute que le feu tourbillonnait déjà sur le toit embrasé.

— Essayons de sauver nos habitations, s’écria Content. Mais la main de l’étranger l’arrêta en se plaçant sur son épaule. Au même instant, une douzaine de météores semblables s’élevèrent dans l’air, et vinrent tomber sur différents endroits des piles à moitié allumées. De plus longs efforts eussent été inutiles. Content, abandonnant l’espoir de sauver sa propriété, vit bien que tous les efforts devaient se tourner vers leur sûreté personnelle. Ruth, revenue de sa frayeur, se hâta de donner les ordres nécessaires. Pendant quelques instants les femmes transportèrent dans la petite citadelle tout ce qui était utile à leur subsistance ; la lueur éclatante qui pénétrait jusque dans les plus sombres passages des appartements rendait le mystère impossible ; les cris annoncèrent une nouvelle attaque, les flèches tombaient de toutes parts, chacun était obligé d’exposer sa personne en transportant à la citadelle les objets d’une absolue nécessité. Néanmoins la fumée croissante servait en quelque sorte de rideau, et Content reçut bientôt l’heureuse nouvelle qu’il pouvait commander la retraite de la petite troupe. La conque donna le signal convenu, et avant que les sauvages eussent le temps de comprendre sa signification, ou de profiter de la destruction des palissades, les assiégés atteignirent la porte de la citadelle. Cependant il y eut un moment de confusion qui n’aurait pas été sans danger si ceux qui reçurent l’ordre de se rendre aux meurtrières n’eussent été prêts à faire feu sur les sauvages qui auraient eu la hardiesse de se présenter à la portée de leur fusil. Pendant ce temps, quelques personnes restaient encore dans la cour, cherchant si aucun objet utile n’avait été oublié. Ruth avait été l’une des plus empressées ; elle restait alors immobile, les deux mains appuyées sur son front, comme pour ressaisir les pensées de son esprit fatigué par la souffrance.

— Et notre ami mort ! dit-elle ; laisserons-nous ici ses restes pour être déchirés par les sauvages ?

— Non certainement, répondit Content. — Dudley, prête-moi l’aide de ton bras ; nous le porterons dans la plus basse des… — Ah ! la mort a frappé un autre membre de la famille.

La douleur avec laquelle Content fit cette découverte fut bientôt