Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 9, 1839.djvu/201

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Un petit enclos, situé d’un côté de la rue, à peu de distance de l’église, était destiné à servir de lieu de repos à ceux qui avaient terminé leur carrière terrestre ; il ne s’y trouvait encore qu’un tombeau solitaire.

L’auberge se distinguait des bâtiments qui l’entouraient par son étendue comme édifice, par un hangar destiné aux chevaux, et par une sorte d’air d’importance avec lequel elle s’avançait dans la rue au-delà de l’alignement général des autres maisons, comme pour inviter le voyageur à y entrer. Une enseigne était suspendue à un poteau qui ressemblait à un gibet, et que les gelées de la nuit et les chaleurs du jour avaient fait déjà dévier de la ligne perpendiculaire. L’objet qui y était représenté aurait, au premier coup d’œil, réjoui le cœur d’un naturaliste, en le portant à croire qu’il aurait fait la découverte de quelque oiseau inconnu. L’artiste avait pourtant facilité le moyen de ne pas commettre une pareille bévue, car il avait eu soin d’écrire au-dessous de la production de son pinceau : Ceci est enseigne du Whip-poor-Will, nom que le voyageur le moins lettré sait être celui que l’on donne communément dans ce pays au Wish-ton-Wish, ou Engoulevent d’Amérique.

On ne voyait que peu de restes de la forêt dans le voisinage immédiat du hameau. Les arbres avaient été abattus depuis longtemps, et il s’était passé assez de temps pour faire disparaître la plupart des traces de leur ancienne existence ; mais à mesure qu’on s’éloignait du groupe de bâtiments, les signes d’usurpations plus récentes sur la forêt devenaient évidents, et la vue se perdait dans de larges trouées où des arbres abattus et empilés annonçaient l’activité de la hache.

À cette époque, le cultivateur américain, comme la plupart de ceux de l’Europe, demeurait dans son village. La crainte des actes de violence des sauvages avait donné naissance à une coutume semblable à celle qu’avaient produite dans l’autre hémisphère, bien des siècles auparavant, les incursions des barbares conquérants ; coutume qui, à quelques exceptions près, a privé les paysages champêtres d’un charme qu’il paraît que le temps et un état de société plus prospère ne leur rendent que lentement. Quelques restes de cet ancien usage se retrouvent encore dans la partie de l’Union dont nous parlons, et où, aujourd’hui même, le fermier sort du village qu’il habite pour aller cultiver ses champs épars dans les environs. Cependant, comme l’homme n’a jamais