Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 9, 1839.djvu/234

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donnait une nouvelle autorité à ses paroles ; le groupe qui se pressait autour de l’objet de la curiosité générale recula à quelque distance, et ce qu’on pourrait appeler la solennité d’un interrogatoire officiel succéda aux questions empressées et irrégulières qu’on avait adressées au pauvre idiot de retour après sa longue absence.

Les domestiques restèrent debout, formant un demi-cercle derrière le fauteuil du vieux Puritain ; Content s’assit à côté de son père ; Foi se plaça, avec son frère, sur les degrés qui conduisaient de la terrasse dans la maison, de manière que chacun pût les entendre. Whittal ne faisait attention qu’aux aliments que sa sœur venait de lui présenter.

— Maintenant, Whittal, lui dit Foi, tandis qu’un profond silence prouvait combien ses auditeurs étaient attentifs, je voudrais savoir si tu te souviens du jour où je t’ai donné un habit dont le drap venait d’au-delà des mers, et du plaisir que tu avais à en admirer la couleur brillante pendant que tu gardais les vaches ?

Whittal la regarda en face, comme s’il eût entendu le son de sa voix avec quelque plaisir ; mais, au lieu de lui répondre, il continua à dévorer avec avidité la nourriture, grâce à laquelle elle avait espéré regagner sa confiance.

— Sûrement, mon frère, tu n’as pas oublié si promptement le présent que je t’ai fait, ce que j’ai acheté avec l’argent que j’avais gagné en travaillant à mon rouet pendant la nuit. Tu étais alors aussi brillant que ce paon qui étale là-bas sa belle queue. Mais je te ferai présent d’un autre habit, afin que tu puisses aller à l’exercice avec nos jeunes gens.

Whittal laissa tomber le manteau de peau qui lui couvrait les épaules, et répondit en étendant le bras avec la gravité d’un Indien :

— Whittal est un guerrier maintenant ; il n’a pas le temps d’écouter les propos des femmes.

— Tu oublies que, par les matinées les plus froides, c’était toujours moi qui t’apportais ton déjeuner, lorsque tu gardais nos troupeaux ; sans cela, tu ne me donnerais pas le nom de femme.

— As-tu jamais suivi la piste d’un Pequot ? Sais-tu pousser le cri de guerre parmi les hommes ?

— Qu’est-ce que le cri de guerre des Indiens auprès du bêle-