Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 9, 1839.djvu/293

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en soif, le cidre lui a été prodigué ; s’il avait froid, il trouvait un siège près du foyer ; et cependant il y a une raison pour laquelle la hache est dans ma main, et qui a conduit mon pied sur le sentier de la guerre. Pendant plusieurs saisons nous avons, vécu en paix sur des terres achetées des hommes rouges et des hommes blancs. Mais, bien que le soleil fût pur pendant si longtemps, les nuages s’amassèrent à la fin. Une nuit sombre couvrit la vallée ; les Wampanoags, la mort et le feu, entrèrent ensemble dans ma demeure. Nos jeunes gens furent tués, et… nos cœurs furent péniblement affectés.

Content s’arrêta, car sa voix devenait tremblante, et ses yeux avaient jeté un regard sur le visage pâle et abattu de celle qui s’appuyait sur le bras de son fils. Le jeune chef écoutait avec une profonde attention. Tandis que Content parlait, son corps était un peu penché en avant, et toute son attitude offrait celle qu’on prend involontairement lorsqu’on écoute des paroles d’un grand intérêt.

— Mais le soleil se leva de nouveau, dit le grand chef, montrant dans tout l’établissement des preuves non équivoques de prospérité, et jetant en même temps un regard inquiet et soupçonneux sur son plus jeune compagnon. Le matin fut clair, quoique la nuit eût été si sombre. L’adresse d’un visage pâle sait comment faire croître le blé sur un roc. L’Indien insensé mange des racines lorsque la récolte manque et que le gibier devient rare.

— Dieu cessa d’être en colère, répondit Content avec douceur, et croisant ses bras de manière à montrer qu’il désirait ne plus parler.

Le grand-chef allait continuer, lorsque son jeune compagnon posa un doigt sur son épaule nue, et, par un signe, indiqua qu’il souhaitait avoir une communication secrète avec lui. Le premier acquiesça avec respect à cette demande, quoiqu’on pût apercevoir que l’expression des traits du jeune homme lui causait quelque inquiétude, et qu’il cédait avec répugnance, sinon avec dégoût. Mais la contenance du jeune homme était ferme, et il eût fallu une hardiesse plus qu’ordinaire pour refuser une demande faite d’un ton aussi positif. Le plus âgé des chefs s’adressa au guerrier qui était à son côté en lui donnant le nom d’Annawon, et, par un geste d’une dignité si naturelle qu’il aurait pu convenir à un courtisan, il annonça au jeune chef qu’il était prêt à le suivre. Malgré le respect naturel des sauvages pour l’âge, les Indiens, en reculant