Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 9, 1839.djvu/346

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notre message de paix, les colons ont raison de craindre ton inimitié.

Le plus jeune répondit, en montrant les objets à mesure qu’il les nommait :

— Mon père est un sycomore âgé ; il s’appuie contre le jeune chêne. Conanchet est un pin droit et élevé. Il y a bien de la finesse dans des cheveux gris, ajouta le chef, s’avançant légèrement pour appuyer un de ses doigts sur le bras de Soumission ; peuvent-ils dire le temps où nous serons couchés sous la mousse comme une branche de ciguë desséchée ?

— Cela surpasse la sagesse de l’homme. C’est assez, sachem, lorsque nous tombons, de pouvoir dire avec vérité que la terre que nous foulions n’en sera pas plus pauvre. Tes os reposeront dans la terre sur laquelle vivent tes pères ; mais les miens peuvent blanchir sous la voûte de quelque sombre forêt.

La tranquillité du visage de l’Indien sembla troublée. Les pupilles de ses yeux noirs se contractèrent, ses narines se dilatèrent, et sa poitrine laissa échapper un soupir ; puis tout rentra dans le repos, semblable à l’immense Océan lorsqu’il cherche en vain à soulever ses eaux pendant le calme.

— Le feu a effacé de la terre les traces des moccasins de mon père, dit le jeune chef avec un sourire doux, mais amer ; et mes yeux ne peuvent pas les voir. Je mourrai sous cet abri, ajouta-t-il en montrant à travers une ouverture dans le feuillage la voûte azurée ; les feuilles tombantes couvriront mes os.

— Alors le Seigneur nous a donné un nouveau lien d’amitié. Il existe un if et un paisible cimetière dans une contrée lointaine, où des générations de ma race dorment dans leurs tombeaux. Ce lieu est blanchi par les pierres qui portent le nom de…

Soumission cessa tout à coup de parler, et lorsque ses yeux s’arrêtèrent sur son compagnon, il s’aperçut que le curieux intérêt du sachem se changeait subitement en une froide réserve. Ce fut avec une excessive courtoisie que Conanchet changea ainsi le sujet de la conversation :

— Il y a de l’eau au-delà de cette petite montagne, dit-il ; que mon père boive, afin de devenir plus fort, et qu’il puisse vivre pour reposer dans le défrichement.

Le vieillard fit un signe d’assentiment, et ils se dirigèrent en silence vers la source. On pourrait présumer, par la longueur du temps qui s’écoula pendant ce repas, que les voyageurs