Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 9, 1839.djvu/360

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mais lorsque le Narragansett reprit son empire sur lui-même, il affecta de ne plus songer à un effort qui avait été infructueux.

— Si les hommes de ces îles savent peu de chose, ajouta-t-il, il n’en est pas ainsi des Mohicans. Il y eut une fois un grand sachem parmi les Narragansetts ; il était plus sage que le castor, plus agile que le daim, plus fin que le renard rouge ; mais il ne pouvait pas soulever le voile du lendemain. D’insensés conseillers, lui, dirent d’aller sur le sentier de la guerre contre les Pequots et les Mohicans. Il perdit sa chevelure ; elle est suspendue au milieu de la fumée de nom wigwam. Nous verrons si elle reconnaîtra, les cheveux de son fils. Narragansett, voilà des hommes sages, des visages pâles ; ils vous parleront. S’ils vous offrent une pipe, fumez ; car le tabac n’est pas commun dans notre tribu.

Après avoir prononcé ces paroles, Uncas se détourna, livrant sont prisonnier aux interrogations des blancs.

— Voilà le regard de Miantonimoh, sergent Ring, observa l’enseigne Dudley au frère de sa femme. Je reconnais dans ce jeune sachem l’œil et la démarche de son père. Et plus encore, ce chef a les traits de l’enfant que nous avons pris dans les champs il y a une douzaine d’années, et que nous gardâmes dans la forteresse pendant plusieurs mois, enfermé comme une jeune panthère. As-tu oublié cette nuit terrible, Reuben, et l’enfant, et la forteresse ? Un four embrasé n’est pas plus chaud que ne le devenait la chambre où nous étions réfugiés avant de descendre dans les entrailles de la terre. Je ne manque jamais d’y penser lorsque notre bon ministre nous parle avec tant d’éloquence de la punition des méchants dans la fournaise de Tophet.

Le milicien silencieux comprit les allusions de son parent, et s’aperçut bientôt de la ressemblance du prisonnier avec le jeune Indien qu’il avait eu si longtemps devant les yeux. L’admiration et la surprise se mêlaient sur son visage avec une expression qui semblait annoncer un profond regret. Néanmoins, comme ces deux individus n’étaient pas les principaux personnages de la troupe, ils furent obligés de rester spectateurs de la scène qui eut lieu.

— Adorateur de Baal, dit d’une voix sépulcrale le théologien, il a plu au roi du ciel et de la terre de protéger son peuple ! Le triomphe du méchant a été de courte durée, et maintenant l’heure du jugement a sonné.

Ces mots furent adressés à des oreilles qui semblaient ne point