Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 9, 1839.djvu/93

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— Elle est maintenant dans son plein, et il y a peu de moments dans la nuit où une sentinelle ne pourrait pas voir une Peau Rouge dans la partie défrichée. Mais il en sera bien autrement lorsqu’une heure ou deux de ténèbres répandront leurs ombres sur les bois. Il y aura dans peu un changement de lune, cela nous avertit d’être sur nos gardes.

— Tu crois donc réellement qu’il y a dans les environs une bande de sauvages qui attendent le moment opportun ? demanda l’officier avec une inquiétude si marquée, que Foi, quoique à peine apaisée, ne put s’empêcher de jeter un regard malin à son compagnon. Cependant on voyait en même temps dans les yeux de la jeune fille une expression qui avertissait Ében Dudley de prendre garde à lui, et qui menaçait de contredire ses sinistres présages.

— Il peut y avoir des sauvages cachés dans les montagnes, à un jour de marche dans la forêt ; mais ils connaissent trop bien la portée des fusils des blancs pour dormir à la distance qu’elle peut atteindre. Il est dans la nature de l’Indien de manger et de dormir lorsqu’il a du temps à consacrer au repos, et de jeûner et d’assassiner lorsque l’heure de l’attaque est venue.

— Et quelle est la distance jusqu’à l’établissement le plus voisin du Connecticut ? demanda l’Anglais avec un air d’indifférence si affectée qu’il laissait deviner l’agitation intérieure de son esprit.

— Vingt heures à peu près conduiraient un habile coureur aux plus proches habitations, en réservant peu de temps pour les repas et le sommeil. Néanmoins celui qui est sage ne se livrera guère au repos avant d’être en sûreté dans quelque bâtiment semblable à cette forteresse, ou du moins avant qu’il y ait entre lui et la forêt une bonne palissade de pieux de chêne.

— N’y a-t-il aucun sentier par lequel les voyageurs puissent éviter la forêt pendant les ténèbres ?

— Je n’en connais aucun. Celui qui quitte Wish-ton-Wish pour les villes qui sont au bas de la montagne, doit faire son lit de la terre, ou bien voyager aussi longtemps que sa monture peut le porter.

— Nous en avons vraiment fait l’expérience en venant ici. Tu penses donc, ami, que les sauvages sont dans leur temps de repos et qu’ils attendent le changement de lune ?

— D’après mon opinion, nous ne les aurons pas avant, reprit