Page:Coppée - Œuvres complètes, Poésies, t4, 1909.djvu/24

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Sur les débris de sa machine, dans son sang !
Comme a fait son chauffeur, il pouvait fuir en lâche.
Non ! martyr du devoir, victime de sa tâche,
Jusqu’au dernier moment, ― sûr de mourir, sans peur, ―
Il a serré le frein, arrêté la vapeur ;
Et sans lui, l’accident serait cent fois plus grave.

Certes, autour du mort, on dit : « C’était un brave ! »
Mais elle est brève, hélas ! la pitié des heureux.
Vite, on jette un manteau sur ce cadavre affreux
Dont l’aspect épouvante et dégoûte les dames.
Et nul ne peut savoir que le pire des drames
S’est passé dans cet homme avant qu’il expirât,
Que ce héros fut près d’agir en scélérat,
Qu’un instinct généreux triompha de sa haine,
Que son âme vainquit en lui la bête humaine,
Et qu’entre deux partis à prendre ayant le choix,
Marc l’anarchiste est mort pour sauver les bourgeois !