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histoire.

Laforêt, gentilhomme français réfugié, au service de Hanovre, appuyé de tout le crédit de l’Angleterre, réclama-t-il ses biens injustement ravis[1] ; le régent ne put empêcher que sa requête ne fût annulée au conseil de régence. En cette même année, le farouche Lamoignon de Baville, dont le gouvernement pesait depuis trente ans sur la province du Languedoc « dont il était la terreur et l’horreur[2], » fut rappelé à Paris, après avoir vu sans doute poindre le rétablissement d’un culte qui avait lassé ses rigueurs. Cet homme cruel, retiré en soi-même, atteint d’une surdité absolue, passa le reste de sa carrière, sans remords, dans une solitude presque complète. En lisant la série continuelle et atroce des supplices ordonnés par cet intendant en Languedoc, et le sang-froid inouï avec lequel il gouverna par les roues, les gibets, et même les bûchers, assistant lui-même souvent à la question des prisonniers, on ne trouve, dans les temps modernes, que la nature de Fouquier-Tinville qui puisse être comparée à la sienne par le calme et la tenue parfaite d’esprit au milieu de supplices journaliers. Le don de la sérénité dans le sang ne fut peut-être jamais porté aussi loin.

Une autre circonstance, au premier abord bien futile, vint donner au gouvernement du régent une couleur assez inquiétante pour les réformés du royaume. Le financier Jean Law était fils d’un presbytérien écossais. Ce fut cet homme d’un esprit hardi, qui fit de l’agiotage une théorie sublime, et qui parvint à

  1. Saint-Simon, Mémoir., ann. 1717.
  2. Ibid. ann. 1718. Voy., Pièc. justific., no II, une lettre autographe de Baville, lors de son administration de la province qu’il gouverna en maître absolu, de 1685 à 1718, et comme étant « la terreur du Languedoc. » (Mme de Sévigné, Lett. du 2 octobre 1689.)