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des églises du désert.

Cette soif du cardinalat qui avait consumé Dubois vint s’emparer de l’évêque de Nantes, qui voyait dans le chapeau un pas de fait vers le poste de premier ministre déjà convoité par l’évêque de Fréjus. Mais le jansénisme était comprimé ; ce champ épineux ne paraissait plus promettre des récompenses prochaines. Alors l’évêque de Nantes chercha à remplir auprès du duc de Bourbon le rôle vacant par l’absence des jésuites ; il crut trouver dans les fonctions d’un autre Letellier le moyen sûr de s’attirer la plus haute bienveillance de Rome. On conçoit qu’après avoir vainement sollicité dans le sens de sa cause et le duc d’Orléans et Dubois, il se soit empressé de l’offrir au duc de Bourbon, dont l’esprit était entièrement incapable d’en saisir toutes les conséquences, et aux yeux duquel les protestants ne paraissaient qu’une petite fraction de sectaires séditieux. Ces dispositions devaient d’autre part flatter la cour, et entrer dans les vues de ces grands seigneurs commandants du midi, dont le duc de Bourbon venait de récompenser le vigilant fanatisme. Ainsi, l’ardeur des dignités de l’Église, la vanité nobiliaire, et la manie gouvernementale, semblaient se réunir pour inspirer un retour vers l’ancienne intolérance. À côté de toutes ces vues diverses, le cauteleux Fleury laissait faire, sans pousser au fanatisme et sans s’y opposer, espérant par là éviter l’odieux d’une cruauté gratuite, et se réservant, sans y prendre une part directe, un certain mérite auprès de Rome pour le chapeau qu’il convoitait en silence. Le duc de Bourbon fut donc joué en toute cette affaire par les espérances ambitieuses de deux prêtres, qui surent faire tourner à leur profit personnel l’odieux dont ils le couvraient. Ces manœuvres si bien déguisées expliquent comment