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des églises du désert.

des jugements, le nom du chef-lieu d’arrondissement, la quotité des amendes, et enfin le montant des frais. Toutes les villes importantes de la province furent successivement rançonnées, depuis les médiocres amendes de 350 liv. et de 200 liv. qui frappèrent le Mas d’Azil et Graissesac, jusqu’aux plus imposantes recettes de 3,500 liv. et de 4,000 liv., qui provinrent de Montpellier et d’Uzès. En Dauphiné, les mêmes persécutions financières eurent lieu, seulement sur une plus vaste échelle encore. D’après la requête que les protestants du Dauphiné ont adressée au roi dans le mois de novembre 1750, les amendes et les frais s’élevaient à plus de 200,000 liv. « qu’on a exigées avec la dernière rigueur. » Ces pauvres gens disent dans leur requête, qu’ils entendaient, du fond de leurs prisons, vendre leurs effets à l’enchère, et distribuer leurs héritages pour satisfaire à l’un ou à l’autre des articles des amendes. Au surplus, ces mesures fiscales n’arrêtèrent en rien le mouvement et le progrès des églises. Il est clair qu’elles durent avoir pour unique résultat de réaliser en Languedoc un système exceptionnel d’impôts, et de faire de cette province un pays de contributions extraordinaires. C’était

    1752, offre un effectif de 119,260 livres d’amendes, plus 38,348 liv. de frais. Ces chiffres concernent le Languedoc ; quant au Dauphiné, A. Court estime que la somme totale fut bien plus forte encore, vu les ressources de la province. Il est surabondamment constaté que les édits de Louis XIV étaient devenus entre les mains des intendants un moyen pour battre monnaie. L’intendant Lenain condamna, le 26 septembre 1748, la femme Oranger Fesquet, de Ganges, à 3,000 liv. d’amende pour avoir fait le métier d’accoucheuse. Étienne Gidès de Lussan, près d’Uzès, ayant jugé à propos de faire sortir sa fille du royaume, fut condamnée, par ordonnance de M. Lenain, en 1745, à 6,000 livres d’amende, sous contrainte de garnisaire à 4 liv. par jour, et à charge de rappeler sa fille sous peine de pareille amende, et de plus grande, s’il échoit. Ce jugement est moins celui d’un magistrat catholique que d’un percepteur judicieux.