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des églises du désert.

gration des religionnaires[1]. Nous verrons un sage et intègre magistrat, Joly de Fleury, interrogé par le Conseil de Louis XV, essayer vainement de formuler une consultation précise au milieu de la confusion où les édits avaient jeté l’état civil des protestants. Plus tard nous verrons l’équitable Malesherbes, Breteuil et Rulhière, cherchant à montrer que de si longues persécutions, en ce qui touchait la position de l’état civil de toute une classe de Français, reposaient sur un malentendu. Tout ceci nous montrera surabondamment que, dans ce malfaisant système législatif, il n’y avait d’arrêté et de méthodique que l’arbitraire du prince et les griefs du clergé ; mais il est impossible de découvrir aujourd’hui la moindre méthode dans ce plan d’où la justice fut si inflexiblement bannie. Nous n’essaierons point de suppléer à la logique des persécuteurs. Nous ne ferons point de réflexions sur ces lois cruelles ; mais

  1. Il a été publié des recueils nombreux et détaillés des lois de Louis XIV contre les protestants. On en trouvera une liste textuelle, immense et effrayante, formant pièces justificatives du grand ouvrage sur l’Histoire de l’édit de Nantes (1695. Delft, 5 vol. in-4o, par Élie Benoît, ministre exilé d’Alençon). Pour les temps immédiatement antérieurs à la révocation, de 1685 et jusqu’en 1695, cette collection offre trois cent trente-trois édits, déclarations et arrêts. Mais beaucoup d’entre eux concernent des espèces particulières. Nous avons fait notre travail analytique sur les recueils plus officiels concernant la rel. prél. réf., imprimés avec privilège du roi, et contenant la série des édits, déclarations et arrêts du Conseil depuis 1669 jusqu’en 1729, i vol. in-12 de 456 p. Le volume contient cent quatre-vingt-un édits ou arrêts, tous non abrogés et devant servir de manuel de poche aux magistrats persécuteurs. J’ai travaillé sur l’exemplaire annoté et paraphé de M. Challan, procureur du roi à Meulan, parl. de Paris. Ces volumes sont plus instructifs et donnent plus à penser que le roman d’ailleurs fort agréable de Rabaut-Saint-Étienne, publié en 1782, où il montre un vieux Cévenol se débattant sous les suites de toutes les incapacités légales dont les édits avaient frappé les protestants ; ce livre spirituel n’a d’autre défaut que celui de donner la forme d’une nouvelle à des faits qui réclament toute la sévérité de l’histoire.