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histoire.

presque dans les bras d’une de ses maîtresses, et que tous les honneurs furent accordés à sa cendre, même l’oraison funèbre. Mais le soir de l’inhumation de Molière, une vile populace vint insulter ses restes. Deux cents personnes conduisirent silencieusement le cortège nocturne du plus beau génie dont la France s’honore.

Des autorités infiniment plus graves que celle de Mme de Sévigné purent égarer la cour de Versailles sur sa conduite envers les protestants. Le conseiller d’Aguesseau succéda, en 1673, à M. de Bezons, qui était depuis vingt ans intendant de Languedoc ; il s’attacha fortement au grand objet de la religion réformée. Voici le jugement que porta sur la conduite de son père le chancelier d’Aguesseau, honneur de notre magistrature, et dont la statue brille aujourd’hui devant le péristyle du temple des lois. « Il approuvait l’usage de ces lois temporelles, dont je ne doute pas même qu’il n’ait inspiré plusieurs, par lesquelles le roi excluait les protestants des fonctions publiques ou de la participation de certains privilèges… Cette voie légitime en soi, lui plaisait principalement, parce qu’elle excitait les religionnaires à rentrer en eux-mêmes, à approfondir les causes de leur séparation, et à se convaincre mieux par un examen qu’ils n’avaient peut-être jamais fait, de l’injustice des prétextes qui avaient porté les premiers réformateurs à quitter la route de leurs pères… Aucunes lois ne lui paraissaient devoir être plus rigoureusement interprétées que celles où des sujets rebelles avaient forcé leur roi, les armes à la main, de leur accorder le pouvoir d’élever dans son royaume autel contre autel. On vit en effet tomber, par ses jugements, un grand nombre de temples. » (Discours