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des églises du désert.

sur la vie de M. d’Aguesseau, par le chancelier, adressé à ses enfants.) Les principes et la conduite du conseiller d’Aguesseau, austère de mœurs et sincèrement pieux, lorsqu’il fut nommé intendant du Languedoc, donne beaucoup à penser, quant à la disposition des esprits en France à cette époque presque inexplicable. Le chancelier nous raconte que, malgré les édits, les assemblées des religionnaires commencèrent à Saint-Hyppolite, dont le conseiller avait fait démolir le temple. On prit les armes des deux côtés, dans le Languedoc et le Vivarais. Le conseiller recommandait les moyens de douceur ; malgré lui, des troupes envoyées par le ministre Louvois pénétrèrent en Dauphiné. « Quelques escadrons de dragons ayant attaqué un corps de rebelles qui allaient tenir une assemblée, passèrent environ deux cents hommes au fil de l’épée, qui firent même assez chèrement acheter leur mort. » (Disc. du chancelier d’Aguess.) Après toutes ces luttes avec les chefs militaires, vinrent les jugements du conseiller intendant : « Ce fut au moins une grande consolation pour mon père, dans ce qui le regardait personnellement, d’avoir pu finir cette grande affaire sans qu’il en coûtât plus d’un seul supplice à son humanité. Le ministre Homel fut l’unique coupable dont le sang répara le crime de tous les autres[1]. Mon père le

  1. Isaac Homel, pasteur de Soyon en Vivarais, exécuté à Tournon le 20 octobre 1683, à l’âge de 72 ans. Nous nous garderons de reproduire les détails épouvantables de ce supplice (V. Hist. de l’éd. de Nantes, tom. iii, 667). La mort de ce vieillard courageux, qui avait appuyé l’avis des armes et qui avait même prêché devant des assemblées de gens armés, laissa dans la contrée la mémoire d’un martyr populaire. Nous possédons dans nos pièces du XVIIe siècle un fragment manuscrit bien usé et fatigué, ayant pour titre : « Discours du grand Homel, ministre du saint évangile de notre Seigneur Jésus-Christ, sur la roue. » Nous ne rapporterons point ce morceau, dont la lecture est bien