Page:Corday - La Vie amoureuse de Diderot.djvu/157

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dront leur place, et je ne voudrai plus mourir. »

Elle a ennobli sa vie. Chez Diderot, l’amour fortifie le respect de soi-même. Il a pris son amie pour juge, et il ne veut pas déchoir à ses yeux : « J’ai élevé dans mon cœur une statue que je ne voudrais jamais briser ; quelle douleur pour elle si je me rendais coupable d’une action qui m’avilît à ses yeux !… Aimez-moi donc toujours afin que je craigne toujours le vice. Continuez de me soutenir dans le chemin de la bonté. » Elle est sa conscience et son modèle. Certain d’être aimé de la plus rare, de la plus noble des femmes, il entend mériter une telle récompense. « Oh ! mon amie, ne faisons point le mal, aimons-nous pour nous rendre meilleurs, soyons-nous, comme nous l’avons été, des censeurs fidèles l’un à l’autre… Rendez-moi digne de vous, inspirez-moi cette candeur, cette franchise, cette douceur qui vous sont naturelles. »

Elle a exalté sa vie. Elle a jeté, sur l’existence du philosophe, un éclat précieux qu’il n’eût pas connu sans elle. Près d’elle, il vit pleinement : « Avec vous, je sens, j’aime, j’écoute, je regarde, je caresse, j’ai une sorte d’existence que je préfère